S03-P01-C09 Granulomatose éosinophilique avec polyangéite (Chapitre archivé)

S03-P01-C09 Granulomatose éosinophilique avec polyangéite (Chapitre archivé)

Médecine interne

LOÏC GUILLEVIN

Chapitre S03-P01-C09

Granulomatose éosinophilique avec polyangéite (Churg-Strauss)

Loïc Guillevin
ATTENTION : Les informations contenues dans ce chapitre sont susceptibles d’être obsolètes, il existe une version plus récente de ce chapitre.
Lien vers la mise à jour

La granulomatose éosinophilique avec polyangéite (Churg-Strauss) (GEPA) est une vascularite systémique rare, décrite par Churg et Strauss, caractérisée par la présence d’un asthme sévère, d’une éosinophilie, d’une infiltration éosinophilique des tissus et de manifestations extrapulmonaires. L’histologie est celle d’une vascularite nécrosante des vaisseaux de petits et de moyen calibre, une infiltration tissulaire par des éosinophiles et la présence de granulome pariétal et périvasculaire. Le diagnostic est largement fondé sur les caractéristiques cliniques et sur des critères de classification. La GEPA est souvent révélée par des manifestations cliniques pulmonaires et extrapulmonaires. Une éosinophilie est présente, parfois importante. L’asthme est préexistant ou contemporain de la vascularite. Des anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA), antimyéloperoxydase (MPO) sont présents chez moins de 40 % des patients [12]. Le caractère hétérogène de la GEPA est probable et au moins deux phénotypes ont été décrits. Par commodité, nous regrouperons les diverses formes de la maladie sous le terme de GEPA mais il n’est pas exclu que cette maladie, ou plutôt ce syndrome, soit démembré dans les années qui viennent.

Classification

Récemment, un groupe d’experts a suggéré de renommer le syndrome de Churg-Strauss, granulomatose éosinophilique avec polyangéite (GEPA) [6]. Tous les éléments de classification des vascularites sont exposés au chapitre S3-P1-C7. À côté de la nomenclature de Chapel Hill [6], la classification de l’American College of Rheumatology peut aussi être utilisée [10].

Épidémiologie

La prévalence de la GEPA est 10,7 à 13 4 millions d’habitants. L’incidence annuelle va de 0,5 à 6,8 nouveaux cas par million d’habitants, selon les pays. L’incidence de la GEPA (Churg-Strauss) est plus élevée chez les patients asthmatiques, s’échelonnant de 34,6 à 60,4 cas par million d’habitants. La maladie peut survenir à tout âge, avec un âge moyen de 48 ans et il n’y a pas de prédominance d’un sexe par rapport à l’autre [2].

Facteurs déclenchants

Divers antigènes, des agents infectieux, des médicaments, des désensibilisations ou des vaccinations pourraient déclencher la survenue de la maladie. Parmi les médicaments, on a impliqué les antagonistes des récepteurs des leucotriènes, comme le montélukast et le zafirlukast. Il se peut aussi que les médicaments incriminés ne soient qu’indirectement impliqués du fait de leur efficacité qui permettrait la décroissance des corticoïdes, révélant alors une maladie latente. Les vaccinations ont été considérées comme pouvant déclencher la GEPA ou une de ses poussées. C’est pourquoi il est préférable de ne pas vacciner les patients dont la maladie n’est pas contrôlée. À l’inverse, le risque infectieux est tel chez les patients ayant une vascularite à tropisme pulmonaire que nous encourageons la vaccination, notamment antipneumococcique et antigrippale.

Manifestations cliniques

Signes de début

Ils sont constants à un moment ou un autre de la maladie. L’asthme précède habituellement la vascularite, mais un certain nombre de patients ne sont pas asthmatiques lorsque surviennent les signes systémiques de vascularite. Il y a parfois une concomitance d’apparition entre l’asthme et la vascularite. Les signes cliniques sont variables. En règle générale, il y a une altération de l’état général, et des atteintes viscérales au sein desquelles la mononévrite multiple est prédominante. L’atteinte cutanée se traduit par un purpura nécrotique. Une vascularite de l’intestin, des reins et du cœur doit être recherchée. Ces derniers symptômes sont associés avec un mauvais pronostic. Les principaux signes cliniques sont décrits dans le Tableau S03-P01-C09-I [1], [2], [3], [7], [12], [13].

Tableau S03-P01-C09-I Principales manifestations cliniques au cours de la granulomatose éosinophilique avec polyangéite (Churg-Strauss).

Chumbley et al., 1977 [1]

Lanham et al., 1984 [7]

Guillevin et al. [3]

Sinico et al., 2005 [13]

Sablé-Fortassou et al., [12]

Comarmond et al., 2013 [2]

Nombre de patients

30

16

96

93

112

383

Hommes/femmes

21/9

12/4

45/51

39/54

55/57

199/184

Âge moyen (années)

47

38

48

52

52

50

Asthme

100

100

100

96

100

91

Signes généraux

70

68

45

49

Infiltrats pulmonaires

27

72

38

50

65

39

Pleurésie

29

9

ORL

70

70

47

78

77

48

Mononévrite multiple

63

66

78

64

72

46

Signes digestifs

17

59

33

21

32

23

Atteinte cardiaque

16

47

30

16

35

27

Arthalgies

20

51

41

37

30

Myalgies

68

54

54

39

Peau

66

51

53

52

40

– purpura

48

– nodules

27

30

Atteinte rénale

20

49

16

27

16

22

La plupart des résultats sont exprimés en pourcentages.

Signes généraux

Les signes généraux sont une fatigue, une sensation de malaise, une fièvre dans la moitié des cas et un amaigrissement. L’association de ces symptômes à un asthme et une éosinophilie supérieure à 1 500/mm3 permet de faire le diagnostic. Il y a également fréquemment des douleurs articulaires mais pas d’arthrite, ni de déformation des articulations. Les myalgies sont fréquentes, habituellement observées dans la moitié des cas.

Manifestations respiratoires

Les signes pulmonaires précèdent la vascularite dans 96 à 100 % des cas. L’intervalle moyen est de 9,3 ± 10,8 ans [2]. L’âge moyen d’apparition de l’asthme chez des patients présentant une GEPA est environ 30 ans. Cet asthme souvent sévère, cortico-dépendant progresse rapidement avant le début des manifestations extrapulmonaires. Il est associé à une atteinte ORL comprenant une rhinite dans 70 % des cas, une obstruction nasale, une polypose nasale et une sinusite non destructrice (62,5 %). La rhinite n’est pas nécessairement d’origine allergique. La radiographie thoracique et la tomodensitométrie en coupes fines mettent en évidence, dans un certain nombre de cas, des infiltrats alvéolaires (Figures S3-P1-C9-1 et Figure S3-P1-C9-2). Il est également classique d’observer des hémorragies alvéolaires. Une atteinte rénale (syndrome pneumorénal) ou une mononévrite multiple peuvent s’y associer. Les signes pleuraux sont rares.

Figure S03-P01-C09-1

Infiltrats pulmonaires bilatéraux.Radiographie thoracique de face.

Figure S03-P01-C09-2

Infiltrat pulmonaire apexien.Tomodensitométrie thoracique.

Signes neurologiques

La neuropathie périphérique est la manifestation extrapulmonaire la plus fréquente. Il s’agit d’une mononévrite multiple sensitivomotrice, touchant les nerfs périphériques, plutôt des membres inférieurs que supérieurs. Elle n’est pas différente de celle observée dans la périartérite noueuse (voir chapitre S03-P01-C08) et dans les autres vascularites associées aux ANCA.

Signes cutanés

Une atteinte cutanée est présente chez 40 à 75 % des patients. Il s’agit d’un purpura palpable, souvent nécrotique, « ayant du corps ». Il siège aux membres inférieurs. Des nodules cutanés ou des papules ou des lésions urticariennes peuvent être présentes. Outre les lésions des membres, on décrit de temps en temps des signes cutanés du front et du scalp. Un livedo reticularis peut être présent. Les granulomes extravasculaires, faits d’éléments violacés et parfois linéaires, non spécifiques, siègent volontiers aux faces d’extension des membres ou sur le tronc.

Atteintes digestives

Comme dans d’autres vascularites nécrosantes, l’atteinte digestive peut être sévère et son pronostic mauvais. Il peut y avoir des douleurs, des nausées et vomissements et de la diarrhée. Il peut y avoir des lésions ischémiques, notamment de l’intestin grêle, qui peuvent conduire à des perforations digestives et des saignements. On a aussi décrit aussi des atteintes digestives à éosinophiles comme une gastrite ou une atteinte du grêle.

Signes cardiaques

L’atteinte cardiaque est de mauvais pronostic. La moitié des décès de la maladie s’observe chez des patients qui ont présenté une insuffisance cardiaque. La fréquence des atteintes cardiaques est très variable d’une étude à l’autre allant de 15 à 84,6 %. Nous avons montré [12], avec d’autres [13], que la fréquence d’atteinte cardiaque était variable selon le statut immunologique des patients. Ceux qui avaient des ANCA avaient moins d’atteinte cardiaque que ceux qui n’en avaient pas (12 versus 49 %). Ces résultats suggèrent que l’atteinte cardiaque est en partie liée à des mécanismes autres qu’une vascularite et on peut invoquer soit une toxicité des éosinophiles, soit une atteinte granulomateuse du myocarde. En cas d’insuffisance cardiaque, le pronostic vital n’est pas seulement engagé à court terme mais aussi à long terme car les défaillances cardiaques peuvent être tardives. Les troubles du rythme sont fréquents et peuvent être responsables de morts subites. Les investigations cardiaques comprennent, outre les radiographies du thorax, électrocardiogrammes et échographie, une IRM cardiaque qui permet d’évaluer l’étendue des lésions (Figure S3-P1-C9-3). Des progrès sont encore à venir, avec notamment l’utilisation de la tomographie par émission de positons (TEP) cardiaque qui montre non seulement les lésions, de topographie superposable à celle de l’IRM, mais aussi leur caractère récent ou ancien.

Figure S03-P01-C09-3

Atteinte inflammatoire de la paroi inférolatérale (myocardite).a) Hypersignal en séquence T2 sous-épicardique (œdème). b) Rehaussement tardif après injection de gadolinium, traduisant l’expansion de l’espace interstitiel d’origine inflammatoire (œdème et nécrose myocytaire). La topographie sous-épicardique élimine un infarctus ischémique.</p

(Collection Professeur O. Vignaux.)

Manifestations rénales

Elles sont moins fréquentes que dans d’autres vascularites associées aux ANCA, environ 22 % [2]. Toutefois, les lésions glomérulaires sont les mêmes que celles observées au cours de la granulomatose avec poly-angéite (Wegener) ou la polyangéite microscopique. Il s’agit d’une glomérulonéphrite extracapillaire, pauci-immune, rapidement progressive. La biopsie rénale montre des croissants glomérulaires, cellulaires ou fibreux selon l’ancienneté de l’atteinte rénale. L’atteinte rénale reflète plus le versant vasculaire de la maladie que son versant granulomateux. L’atteinte rénale est un des éléments du five factor score (FFS) et fait partie des signes de mauvais pronostic lorsque la créatininémie dépasse 140 mmol/l [4].

Autres manifestations cliniques

Les manifestations oculaires incluent les épisclérites, les sclérites, les nodules conjonctivaux (localisations de granulomes), les kératites et les uvéites. Une paralysie des nerfs crâniens ainsi que des neuropathies optiques ont été décrites.

Investigations complémentaires

Une éosinophilie supérieure à 10 % des éléments figurés du sang ou plus de 1 500 éléments par millimètre cube est quasi constante, avant toute corticothérapie. La valeur moyenne de l’éosinophilie est de 7 400/mm3 [2]. L’éosinophilie en quelques jours et de façon durable après le début de la corticothérapie, contrairement à ce qui est observé dans les hyperéosinophilies secondaires un syndrome myéloprolifératif ou lymphoprolifératif. Les ANCA anti-MPO sont présents dans moins de 40 % des cas [2]. Lors de la décroissance des corticoïdes, on assiste souvent à une augmentation des éosinophiles entre 1 000 et 1 500/mm3. Son interprétation est difficile : l’éosinophilie peut témoigner d’une reprise de la maladie et doit être surveillée attentivement. Une adaptation des doses de corticoïdes peut-être nécessaire et une augmentation extrêmement faible, de l’ordre de 1 à 2 mg, peut suffire à normaliser le nombre d’éosinophiles. Une élévation des immunoglobulines E (IgE) est présente chez de nombreux patients évalués avant la mise sous corticoïdes. Les biopsies bronchiques peuvent être utiles, de même que des biopsies transbronchiques. L’IRM cardiaque est un des examens les plus performants pour détecter d’atteinte myocardique. Après injection de gadolinium, les séquences montrent l’atteinte du muscle cardiaque ou une fibrose endomyocardique. En dehors de toute symptomatologie clinique, la découverte d’anomalies pose le problème de leur signification. L’angiographie coronaire est recommandée en cas d’ischémie myocardique. Elle peut rarement montrer des sténoses vasculaires étagées dues à la vascularite.

Diagnostic

Le diagnostic de GEPA reste essentiellement clinique. La confirmation biopsique du diagnostic est bien entendu importante mais ne peut pas toujours être obtenue. Les ANCA, lorsqu’ils sont présents contribuent fortement au diagnostic.

Les difficultés diagnostiques tiennent souvent aux formes essentiellement respiratoires, sans ou avec peu de signes extrapulmonaires. Les formes frontières avec d’autres maladies éosinophiliques se discutent et il est souvent difficile de porter le bon diagnostic et de distinguer la GEPA d’une pneumonie à éosinophiles, d’un asthme hyperéosinophilique ou d’un syndrome hyperéosinophilique. Il est probable que, dans un avenir proche, grâce à de nouveaux marqueurs, biologiques, immunologiques ou génétiques, il sera possible de mieux décrire les contours de la maladie.

Lorsqu’une biopsie est faite, l’histologie montre la vascularite nécrosante et parfois un granulome péri- ou extravasculaire. Comme dans toutes les vascularites, l’évolution se fait la cicatrisation avec constitution d’une endartérite fibreuse.

Les critères diagnostiques publiés par J. Lanham [7] sont toujours employés. Les trois principaux éléments diagnostiques sont l’asthme, une éosinophilie au-delà de 1 500/mm3 et une vascularite qui touche un ou plusieurs organes.

Pronostic et évolution

Le pronostic est généralement bon et les malades répondent bien aux corticoïdes. Dans un essai thérapeutique dévolu aux formes n’ayant pas de facteurs de mauvais pronostic conformément au five factor score [4], la mortalité n’était que de 3 %. La survie globale des patients est de 89 % à 5 ans. La cardiomyopathie en est la première cause de décès, précédée par les vascularites digestives.

Les rechutes sont fréquentes mais moins que dans d’autres vascularites nécrosantes comme la polyangéite microscopique ou la granulomatose avec polyangéite (Wegener). Un quart des malades rechutent. La plupart de ces rechutes sont rapidement contrôlées par la corticothérapie et parfois par une association de corticoïdes et d’immunosuppresseurs.

Traitement

Corticoïdes

Quelle que soit l’attitude ultérieure du clinicien vis-à-vis de la corticothérapie et de l’usage des immunosuppresseurs une corticothérapie intraveineuse, brève, à forte dose a sa place dans les formes sévères de la maladie. La méthylprednisolone par voie intraveineuse est conseillée à la posologie de 7,5 à 15 mg/kg/j durant 1 à 3 jours consécutifs. Lorsqu’il n’y a pas de facteurs de mauvais pronostic, il n’est pas nécessaire d’utiliser les bolus de corticoïdes.

La prednisone ou la méthylprednisolone sont prescrites à la dose de 1 mg/kg/j en une à deux prises quotidiennes. Chez l’adulte, l’emploi prolongé de prednisone à une dose supérieure à 1 mg/kg/j ne se justifie pas. Nous conseillons un traitement initial de 3 semaines, suivi d’une phase de décroissance initialement rapide, suivie d’une phase de décroissance lente. Notre objectif est d’atteindre la moitié de la dose initiale en 3 mois et 10 mg en 6 mois. La durée de la corticothérapie est prolongée car il est usuel de maintenir une faible corticothérapie (de l’ordre de 5 à 10 mg/j de prednisone) afin de contrôler l’asthme qui persiste une fois la vascularite guérie. La corticothérapie inhalée permet de diminuer la corticothérapie per os.

Immunosuppresseurs

Si la corticothérapie est insuffisante, en l’absence de facteurs de mauvais pronostic (FFS = 0), ou d’emblée dans les formes avec un FFS supérieur à 1, les immunosuppresseurs sont indiqués.

Cyclophosphamide

Le cyclophosphamide (Endoxan®) est l’immunosuppresseur le plus efficace. II est prescrit, soit par voie orale à une dose initiale de 2 à 3 mg/kg/j (ce qui n’est plus recommandé aujourd’hui), soit en bolus à la dose de 500 à 700 mg/m2 selon le schéma suivant : un bolus à J0, J14, J28 puis tous les 21 jours. Six bolus suffisent habituellement pour obtenir une rémission. L’effet indésirable le plus grave du cyclophosphamide est l’induction de leucémies aiguës ou chroniques ou de lymphomes. L’urotoxicité est également un effet secondaire sérieux du cyclophosphamide, survenant essentiellement lorsqu’il est prescrit par voie orale, avec essentiellement la cystite hémorragique et occasionnellement des cancers de la vessie [8]. L’urotoxicité va de la simple hématurie microscopique (à rechercher systématiquement) au saignement vésical massif avec cystalgies intenses. Les urines sont stériles. Le mécanisme est une toxicité directe, sur la muqueuse vésicale, de l’acroléine, métabolite du cyclophosphamide. Son traitement comprend : suspension thérapeutique, lavage vésical, transfusions éventuelles. Une hydratation suffisante et, en cas de traitement par bolus, la perfusion simultanée de mesna (Uromitexan®) évitent cet effet secondaire. Le cyclophosphamide est responsable d’une diminution de la fertilité ou d’une stérilité chez l’homme. Lorsque le traitement n’excède pas quelques mois, cet effet secondaire est habituellement réversible. Chez la femme, une œstrogénothérapie à 50 gamma/j en continu ou l’utilisation d’analogues de la LH-RH (luteinizing hormone-releasing hormone) pourrait prévenir la stérilité. Par ailleurs, le cyclophosphamide peut entraîner une alopécie réversible, des nausées (en cas de bolus), une atteinte hépatique ou une pneumopathie toxique. Enfin, la survenue d’infections virales, notamment de zona, est fréquente. La leucopénie est usuelle en cas de surdosage. Elle est réversible mais favorise la survenue de complications infectieuses bactériennes. Les bolus induisent moins de cystites hématuriques, de leuconeutropénies durables que la forme orale. II est également probable que le cyclophosphamide donné par voie intraveineuse soit responsable d’un nombre plus faible de leucémies et de lymphomes dans la mesure où la dose administrée est plus faible par voie intraveineuse que par voie orale.

Azathioprine

L’azathioprine (Imurel®) n’est habituellement pas utilisée en première ligne mais c’est le traitement d’entretien le plus fréquemment prescrit. La dose est de 2 mg/kg/j. La durée de traitement d’entretien est de 12 à 18 mois. L’azathioprine pourrait trouver une indication d’épargne cortisonique, ce qui n’est pas actuellement démontré.

Méthotrexate

Il a été démontré que, dans les vascularites associées aux ANCA, le méthotrexate était aussi efficace que l’azathioprine. La posologie de méthotrexate employée dans les vascularites est de l’ordre de 0,3 mg/kg, dose à laquelle les effets secondaires ne sont pas rares. Il faut aussi se méfier de la survenue d’une pneumopathie d’hypersensibilité iatrogène.

Mycophénolate mofétil

Il peut être utilisé en cas d’intolérance ou d’échec de l’azathioprine ou du méthotrexate. Son efficacité n’a pas été évaluée dans la GEPA mais, par analogie avec les autres vascularites associées aux ANCA, il a été montré qu’il était moins efficace que l’azathioprine ou le méthotrexate.

Échanges plasmatiques

Les échanges plasmatiques sont prescrits dans le traitement des vascularites sévères. Les bases de leur utilisation sont l’épuration des complexes immuns responsables d’un certain nombre de vascularites et la restauration des capacités d’épuration du système réticulo-endothélial. Il a été démontré que les échanges plasmatiques étaient à même d’améliorer la fonction rénale des patients ayant une vascularites avec ANCA et une créatininémie, avant traitement, supérieure à 500 mmol/l [5]. Le nombre de séances permettant d’obtenir l’effet escompté est de 7 réparties sur 2 semaines. Le soluté de remplacement doit être l’albumine à 4 % et/ou du plasma frais en cas de trouble de l’hémostase.

Biomédicaments

Un certain nombre de nouveaux biomédicaments pourraient trouver leur place dans le traitement de la maladie :

– le rituximab n’a été utilisé que de façon plus anecdotique dans la GEPA. Des rémissions ont été obtenues. Des réactions d’intolérance ont également été observées ;

– le mépolizumab a montré son efficacité dans une courte série de patients et a permis de diminuer la corticothérapie [11]. Un protocole prospectif devrait prochainement préciser les modalités d’administration du médicament et son efficacité dans une large population de malades atteints de GEPA ;

– les immunoglobulines sont régulièrement utilisées dans les vascularites avec ANCA. Elles sont utiles en association à d’autres médicaments ou seules. Elles ont permis d’obtenir la rémission de vascularites associées aux ANCA.

Paramètres de surveillance

L’immunosuppression est fonction de la sévérité de la maladie. Des scores d’évaluation permettent d’orienter les choix thérapeutiques. Le five factor score [4] peut prédire la mortalité des malades atteints de certaines vascularites systémiques. Il a été validé prospectivement dans une large série de patients atteints de périartérite noueuse, de poly-angéite microscopique de granulomatose avec polyangéite (Wegener) et de GEPA. Un autre score d’évaluation, le Birmingham vasculitis activity score (BVAS) [9] est également utilisé pour le suivi des malades. Les corticoïdes suffisent habituellement à contrôler la GEPA sans facteur de mauvais pronostic, alors que l’association aux immunosuppresseurs est nécessaire lorsque le FFS est de 1 ou moins.

Il faut aussi éviter les stimulations antigéniques, spécifiques ou non, susceptibles de réactiver la GEPA et maintenir, dans la plupart des cas, une faible corticothérapie d’entretien de l’ordre de 5 à 10 mg/j. Elle est en règle générale suffisante pour éviter les récidives de l’asthme.

Bibliographie

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2. COMARMOND C, PAGNOUX C, KHELLAF M et al. Eosinophilic granulomatosis with polyangiitis (Churg-Strauss) : clinical characteristics and long-term followup of the 383 patients enrolled in the French Vasculitis Study Group cohort. Arthritis Rheum, 2013, 65 : 270-281.
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8. LE GUENNO G, MAHR A, PAGNOUX C et al. Incidence and predictors of urotoxic adverse events in cyclophosphamide-treated patients with systemic necrotizing vasculitides. Arthritis Rheum, 2011, 63 : 1435-1445.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Guillevin L. Granulomatose éosinophilique avec polyangéite (Churg-Strauss). In : L Guillevin, L Mouthon, H Lévesque. Traité de médecine, 5e éd. Paris, TdM Éditions, 2018-S03-P01-C09 : 1-5.