S26 Oto-rhino-laryngologie

S26 Oto-rhino-laryngologie

S26

Oto-rhino-laryngologie

 

Philippe Herman et Benjamin Verillaud

Partie 1 - Otologie

Nystagmus

Rappelons tout d’abord quelques principes de physiologie du vestibule. Le système vestibulaire déclenche des réflexes visant à stabiliser le regard et la posture. En modulant le rythme de décharge de base des fibres afférentes, les canaux encodent les mouvements de rotation de la tête alors que les otolithes codent les accélérations linéaires et les mouvements de bascule. La stimulation d’un canal déclenche un mouvement oculaire dans le plan de ce canal (première loi d’Ewald). Un canal est excité par une rotation dans le plan de ce canal amenant la tête du même côté. Tout stimulus excitant les fibres afférentes d’un canal est perçu comme une accélération excitatrice dans le plan de ce canal. Le repos correspond à une activité vestibulaire parfaitement symétrique.

L’oreille externe se compose d’un capteur périphérique, le pavillon, et d’un canal de transmission, le conduit auditif externe (CAE). Ce dernier est constitué pour partie d’un canal osseux délimité par l’os tympanal et l’os du rocher, et pour partie d’un conduit cartilagineux en dehors.

Le revêtement de ces deux segments est très différent. La peau recouvrant le conduit osseux est dénuée d’annexes, autrement dit de glandes sébacées et de glandes apocrines. En revanche au niveau du conduit cartilagineux, il existe des annexes épidermiques, essentiellement représentées par les follicules pilosébacés auxquels il faut ajouter les glandes cérumineuses, essentiellement dans les portions haute et basse du conduit.

Le CAE représente un écosystème singulier : en l’absence de facteurs favorisant l’humidité (baignades répétées, ulcération cutanée), la flore est essentiellement constituée de cocci aérobies à type de staphylocoques coagulase négatifs et de diphtéroïdes anaérobies type Propionibacterium, Corynebacterium, etc. Le staphylocoque doré et les bacilles à Gram négatifs sont rares.

Le mécanisme de défense du CAE osseux est essentiellement représenté par la migration épithéliale, qui concerne la surface épidermique de la membrane tympanique et du CAE à proprement parler. Cette migration épidermique est un phénomène lent, mesuré en semaines, pouvant être objectivé par la migration d’un point de tatouage tympanique vers la périphérie du tympan puis vers l’extérieur du CAE. Elle permet l’élimination centrifuge des débris épidermiques tout le long du conduit osseux. À la jonction avec les poils, les débris de kératine sont soulevés et vont être éliminés.

Otite séreuse

L’otite séreuse est due à une inflammation de la muqueuse de l’oreille moyenne durant plus de 2 mois et provoquant la persistance d’un épanchement de liquide plus ou moins épais dans les cavités de l’oreille moyenne.

Physiopathologie

L’histoire naturelle de cette maladie révèle le plus souvent la succession d’une infection virale puis d’une surinfection bactérienne qui provoque la multiplication des cellules sécrétrices de mucus. Ces otites séreuses sont extrêmement fréquentes – sinon quasi constantes – chez le jeune enfant et traduisent la première « rencontre » d’un organisme vierge avec les germes du monde extérieur. Elles sont favorisées par des facteurs infectieux, tel que la fréquentation de crèches qui favorise l’échange de virus, voire de bactéries, ou encore des facteurs anatomiques comme dans le cas des enfants présentant une fente palatine.

Longtemps mise sur le compte d’une inflammation dont on ne comprendrait guère la cause, l’otite séreuse semble en réalité être en rapport avec l’existence de biofilms bactériens au niveau de la muqueuse des cavités de l’oreille moyenne, biofilms témoignant et induisant également une altération de la clairance mucociliaire.

Chez l’adulte, l’otite séreuse est inhabituelle, et impose de rechercher un obstacle mécanique comprimant la trompe d’Eustache, en particulier une tumeur du rhinopharynx ou des espaces para-pharyngés. La survenue d’une otite séreuse impose donc ici un bilan ORL comportant une fibroscopie nasopharyngée complétée par une IRM qui seule peut détecter des tumeurs infiltrantes profondes.

Cette affection constitue l’une des causes les plus fréquentes de surdité de transmission de l’adulte. Elle toucherait jusqu’à 10 % des sujets caucasiens, alors qu’elle serait exceptionnelle chez les non-caucasiens. Elle est caractérisée par le blocage progressif du troisième osselet ou étrier par un foyer osseux anormal, habituellement situé à la partie antérieure de l’étrier. L’atteinte de l’oreille interne est possible mais rare.


La définition de la surdité brusque est clinique : c’est une surdité de perception de survenue rapide (> 3 jours), d’au moins 30 dB, concernant au moins trois fréquences audiométriques consécutives, donc couvrant trois octaves du spectre sonore. Par définition également, il n’existe pas d’étiologie évidente, et pas ou peu de syndrome vertigineux. Le plus souvent, il existe un degré de récupération. Les étiologies sont hypothétiques et rarement prouvées. Ceci s’explique par le fait qu’il n’existe pas de fenêtre d’observation de la cochlée, par opposition aux possibilités d’examen de la rétine. En cas de surdité bilatérale, des étiologies potentiellement plus graves doivent être recherchées.

Physiopathologie

Il existe essentiellement quatre hypothèses physiopathologiques. Chacune répond sans doute à un certain nombre de cas, mais pour l’instant il n’existe pas d’explication uniciste pour ce qui reste un syndrome.

Il s’agit d’un syndrome rare, décrit pour la première fois par Minor en 1998, qui associe diversement des signes cliniques vestibulaires provoqués par un stimulus sonore, encore appelé vertige de Tullio, ou par des mouvements rapides du sujet, une surdité associée à une autophonie et une anomalie radiologique visualisée par le scanner : la déhiscence du canal semi-circulaire supérieur.

On considère comme ototoxique toute substance susceptible de léser l’oreille interne, qu’il s’agisse de la cochlée ou du vestibule, formé des canaux et du système otolithique. Ces lésions peuvent entraîner une surdité, des acouphènes, ou encore une instabilité. Ce risque ototoxique est désormais bien connu et plus de 100 classes de médicaments sont reconnues comme ayant un potentiel ototoxique.

Historiquement, c’est avec l’avènement de la streptomycine pour le traitement de la tuberculose en 1944 qu’apparurent de nombreux cas d’atteinte cochléaire ou vestibulaire. Par la suite, le développement de la classe des aminosides fit émerger une toxicité de classe à l’origine de nombreux travaux expérimentaux pour déchiffrer les mécanismes de cette toxicité. Actuellement les classes principales de médicaments ototoxiques incluent les aminosides et d’autres classes d’antibiotiques, les chimiothérapies à base de sels de platine, les salicylates, la quinine et les diurétiques de l’anse.

La fistule périlymphatique est caractérisée par une communication anormale entre les liquides de l’oreille interne, en l’occurrence la périlymphe, et les cavités de l’oreille moyenne. Les symptômes peuvent être très variables. La cause en est le plus souvent traumatique (barotraumatisme ou explosion), chirurgicale (chirurgie de l’otospongiose), infectieuse (cholestéatome, forme grave d’otite chronique érodant les parois de l’oreille moyenne), exceptionnellement congénitale.

C’est devant la constatation, dans les années 1960, au décours de chirurgie de l’otospongiose, que l’écoulement de périlymphe au travers de la fenêtre ovale pouvait entraîner acouphène, vertige et surdité, que l’intérêt s’est porté sur cette pathologie. Goodhill, au début des années 1980 a systématisé les mécanismes d’apparition de ces fistules, qu’elles soient au niveau de la fenêtre ovale ou de la fenêtre ronde, en distinguant les forces implosives et explosives.

Maladie emblématique, la maladie de Menière se caractérise par la survenue brutale, inopinée, de crises vertigineuses rotatoires intenses, avec nausées, vomissements, pâleur, sueurs. Il s’y associe d’un seul côté des acouphènes qui annoncent souvent la crise, et surtout une surdité transitoire avec sensation d’oreille pleine. Elle est considérée comme étant causée par un hydrops endolymphatique. C’est une maladie relativement fréquente, dont l’incidence varie de 1/10 000 à 1/1 000, avec une forme bilatérale sans doute dans 10 % des cas, et qui touche plus souvent les femmes que les hommes.

Il s’agit d’une tumeur bénigne développée aux dépens de la huitième paire crânienne ou nerf auditif, dans la majorité des cas aux dépens de sa branche vestibulaire. Plus précisément, cette tumeur naît des cellules de la gaine du nerf, les cellules de Schwann, d’où le nom de schwannome vestibulaire ( Figure S26-P1-C10-1). Elle représente 80 % des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux, c’est-à-dire entre la face postérieure de l’os du rocher, le tronc cérébral et le cervelet. Alors qu’elle se présente le plus souvent comme une surdité unilatérale progressive, sa gravité tient aux risques de compression du tronc cérébral à un stade tardif, après des années d’évolution.

Le vertige positionnel résulte d’une excitation transitoire des voies vestibulaires déclenchée par un changement de position. Parce que les organes otolithiques sont sensibles à la direction de la gravité, Barany a, en 1921, formulé l’hypothèse que ces symptômes pouvaient être liés à une lésion des otolithes (saccule et utricule) ou de leurs connexions avec les noyaux vestibulaires et le cervelet.

Cependant depuis la description de Dix et Hallpike en 1952, ce sont les canaux qui sont incriminés, soit parce que des débris flottant dans l’endolymphe vont se déplacer sous l’influence de la gravité et déclencher une activation inadaptée de la cupule (canalolithiase), soit parce qu’une altération de la cupule modifie sa densité : dès lors qu’elle n’a plus la même densité que l’endolymphe, elle devient alors sensible à la gravité dans les positions de la tête où elle se retrouve horizontale (cupulolithiase). C’est le plus souvent le canal postérieur qui va être en cause, possiblement parce que les débris d’otoconies sédimentent la nuit dans ce canal qui est, en position allongée, la partie la plus déclive du vestibule. Mais le canal antérieur ou encore le canal latéral peuvent plus rarement être en cause.

Le vertige positionnel est pratiquement toujours bénin et curable, à l’exception de rares atteintes centrales. À noter qu’une littérature récente s’est focalisée sur le rôle éventuel d’un déficit en vitamine D dans la survenue du vertige positionnel, mais cette hypothèse ne semble pas confirmée.

Partie 2 - Rhinologie

Le saignement de nez ou épistaxis résulte de la rupture de petits vaisseaux dans les fosses nasales ou les sinus. Du sang s’écoule alors spontanément des narines. Lorsque l’origine du saignement est postérieure dans les fosses nasales, le sang coule dans la gorge et il est craché le plus souvent. Lorsqu’il s’agit de crachats sanglants, il faut faire la différence entre une épistaxis, donc issue des fosses nasales, et du sang recraché lors d’efforts de vomissement (hématémèse) ou de toux (hémoptysie). Ce saignement est spectaculaire et angoissant, alors qu’il est le plus souvent d’abondance modeste. Cependant sa répétition peut entraîner une anémie qui en fait la gravité.

Le fibrome nasopharyngien est une tumeur rare, puisqu’elle représente moins de 0,5 % des tumeurs de la tête et du cou. Elle touche presque exclusivement les adolescents de sexe masculin. Il s’agit d’une tumeur bénigne, mais agressive localement. Il n’existe pas de facteur de risque connu, et les circonstances d’apparition sont encore mal comprises, même si les caractères épidémiologiques de cette tumeur ont fait suspecter une cause hormonale. Histologiquement, les éléments de base du fibrome nasopharyngien sont un abondant réseau de vaisseaux larges à parois épaisses, un stroma conjonctif et l’absence de capsule. La tumeur naît dans la région du foramen sphénopalatin, à la partie postérieure de la fosse nasale, et peut ensuite émettre des digitations dans toutes les directions : vers la fosse nasale, mais également vers la fosse infratemporale, les sinus paranasaux, l’orbite, voire vers le sinus caverneux ou la base du crâne.

Les tumeurs osseuses bénignes du massif facial sont essentiellement représentées par l’ostéome (de loin la plus fréquente), la dysplasie fibreuse et le fibrome ossifiant. Elles sont caractérisées par le remplacement du tissu osseux normal par un tissu ostéo-fibreux. L’aspect histologique seul ne permet pas toujours de différencier ces entités, et c’est souvent la conjonction de l’aspect clinique, radiologique et anatomopathologique qui permet de poser le diagnostic. La lésion est le plus souvent unique. Néanmoins, la dysplasie fibreuse peut, dans un tiers des cas, être poly-ostotique (et plus rarement s’associer à une puberté précoce et à une hyperpigmentation maculaire cutanée, dans le cadre d’un syndrome de McCune-Albright), et des ostéomes multiples peuvent être retrouvés dans le cas d’un syndrome de Gardner (maladie autosomique dominante associant des ostéomes multiples à une polypose colorectale et à des lésions cutanées).

Le papillome inversé est la tumeur des tissus mous des fosses nasales la plus fréquente. Elle touche plutôt les hommes, avec un pic d’incidence aux alentours de la cinquantaine. Il s’agit d’une tumeur bénigne qui présente néanmoins un risque de dégénérescence maligne en carcinome épidermoïde dans environ 5 à 10 % des cas (en particulier dans les tumeurs volumineuses, restant parfois méconnues pendant plusieurs années). L’examen histologique montre une hyperplasie épithéliale proliférant sur un mode endophytique en s’invaginant dans le chorion sous-jacent. Elle évolue lentement, mais avec un potentiel destructif local. Le risque de récidive est important en cas de résection incomplète. Elle prend naissance dans le sinus maxillaire ou l’ethmoïde, et dans une moindre mesure dans le sinus frontal ou le sinus sphénoïdal.

L’adénocarcinome de l’ethmoïde est la tumeur maligne la plus fréquente des cavités nasosinusiennes. Il existe environ 200 nouveaux cas par an en France. Ce cancer se développe à partir des glandes accessoires incluses dans le chorion et du revêtement cylindrique de surface cilié et caliciforme de l’ethmoïde. Il existe plusieurs sous-types histologiques, mais les formes différenciées sont prédominantes. L’adénocarcinome de type intestinal est la forme la plus fréquente. Elle touche dans plus de deux tiers des cas les travailleurs du bois : leur risque de développer un tel cancer est supérieur de 800 fois à celui de la population générale ; ce facteur professionnel explique probablement que 9 patients sur 10 sont des hommes (âge moyen : 60 ans). L’adénocarcinome de l’ethmoïde est d’ailleurs pris en charge au titre de maladie professionnelle chez les travailleurs du bois (tableau 47B).

L’esthésioneurome olfactif (aussi désigné sous le terme d’esthésioneuroblastome ou de neuroblastome olfactif) est une tumeur rare prenant naissance au niveau de l’épithélium olfactif du toit des fosses nasales. Elle représente environ 5 % des cancers des fosses nasales et des sinus. Il n’existe pas de facteur de risque connu, et la tumeur peut apparaître à tout âge, même s’il existe un pic d’incidence aux alentours de la 5e décennie. Le sex-ratio est de 1.

Le mélanome malin est une prolifération maligne des cellules mélanocytaires qui touche dans plus de 97 % des cas la peau. Il existe cependant des mélanocytes au sein de la muqueuse nasosinusienne : le mélanome peut donc également concerner cette région. Il s’agit d’une tumeur rare, qui apparaît préférentiellement après 60 ans, sans prépondérance de sexe. Le diagnostic histologique de mélanome muqueux nasosinusien requiert normalement la positivité d’au moins deux marqueurs immunohistochimiques mélanocytaires. L’atteinte en profondeur est précisée, avec un impact sur le pronostic en cas de franchissement de la lamina propria.

Les carcinomes adénoïdes kystiques (ou cylindromes) sont des tumeurs épithéliales malignes à croissance le plus souvent lente, se développant aux dépens des glandes salivaires accessoires. La localisation rhinosinusienne est particulièrement rare (largement < 1 % des tumeurs malignes de la tête et du cou), et semble en fait le plus souvent en rapport avec un envahissement du sinus maxillaire et des fosses nasales à partir des glandes situées dans le maxillaire. Cette pathologie concerne surtout les patients de 40 à 60 ans, sans prépondérance de sexe. Il n’existe pas de facteur de risque connu.

Les choanes constituent la limite entre la partie postérieure des fosses nasales et le rhinopharynx. On leur décrit la forme d’une arche, formée par le vomer médialement, l’aile médiale de la ptérygoïde latéralement, la partie horizontale de l’os palatin en bas, et le plancher du sinus sphénoïdal en haut. L’atrésie choanale est définie par l’imperforation congénitale de la choane. Elle peut être uni- ou bilatérale. Chez les nouveau-nés, qui présentent une respiration nasale exclusive, l’imperforation bilatérale peut se traduire par une détresse respiratoire néonatale. L’atrésie choanale concerne environ 1 nouveau-né sur 7 000. Elle peut être isolée ou entrer dans le cadre d’un syndrome polymalformatif.

La situation anatomique du nez au niveau de l’étage moyen de la face le rend particulièrement vulnérable aux traumatismes de tous ordres. Les os propres du nez (OPN), qui constituent le tiers supérieur de la pyramide nasale, sont plus fréquemment touchés que la portion basse cartilagineuse. La prise en charge de ces fractures a pour but de limiter les risques de séquelles esthétiques (par déformation de la pyramide nasale) et fonctionnelles (par le retentissement sur la perméabilité nasale). Les patients de tous âges peuvent être concernés.

L’épistaxis est l’un des motifs de consultation les plus fréquents en ORL. Elle peut être de gravité variable. Si l’épistaxis survient sans cause évidente dans certains cas, elle peut souvent révéler une pathologie sous-jacente : on distingue alors les causes locales (traumatisme, télangiectasies dans le cadre d’une maladie de Rendu-Osler, et surtout tumeurs rhinosinusiennes bénignes, comme le fibrome nasopharyngé du jeune garçon, ou malignes, comme l’adénocarcinome de l’ethmoïde du travailleur du bois) et les causes générales (trouble de l’hémostase constitutionnel ou d’origine médicamenteuse, hypertension artérielle, infection virale…). La prise en charge en urgence doit donc être associée à un bilan étiologique, notamment en cas d’épistaxis récidivantes et/ou unilatérales.

La maladie de Rendu-Osler est une maladie génétique à transmission autosomique dominante, à expressivité variable. Elle touche environ 1 personne sur 10 000 en France. Le diagnostic est porté en présence d’au moins 3 des 4 critères suivants (et suspecté si seuls 2 critères sont présents) : survenue d’épistaxis répétées ; présence de télangiectasies (en particulier au niveau des fosses nasales, de la bouche et des lèvres, des doigts) ; lésions viscérales (telles que des malformations artérioveineuses (MAV) pulmonaires, cérébrales, médullaires ou hépatiques, des télangiectasies gastro-intestinales) ; présence d’un apparenté au premier degré atteint de la maladie. Les symptômes quotidiens les plus gênants sont liés aux épistaxis et à l’aspect inesthétique des télangiectasies du visage. Ce sont cependant les atteintes viscérales qui font la gravité de la maladie. Les MAV pulmonaires, en provoquant un shunt anormal entre artères et veines pulmonaires, peuvent être à l’origine d’embolies cruoriques ou septiques, et donc d’accidents vasculaires cérébraux, voire d’abcès cérébraux. Les atteintes intestinales peuvent se révéler par des hémorragies digestives.

Une mucocèle est une cavité sinusienne qu’un défaut de drainage a exclu des cavités rhinosinusiennes adjacentes, et qui augmente progressivement de volume du fait de la sécrétion mucoïde continue par les cellules épithéliales qui bordent la cavité centrale. Il s’agit donc d’une lésion bénigne, de croissance lente, mais qui peut entraîner au fil du temps une déformation ou un refoulement des structures adjacentes, comme l’orbite ou la base du crâne, et dans certains cas se surinfecter de façon aiguë : on parle alors de pyomucocèle. Les mucocèles peuvent survenir spontanément, mais elles sont le plus souvent provoquées par un traumatisme, ou d’origine iatrogène post-opératoire. Elles touchent plus fréquemment les adultes que les enfants.

La rhinorrhée cérébrospinale est un écoulement nasal de liquide cérébrospinal (LCS), qui traduit l’existence d’une communication anormale entre les espaces sous-arachnoïdiens et la cavité nasale. La brèche est le plus souvent située au niveau de l’étage antérieur de la base du crâne, mais elle peut aussi concerner les étages moyen (notamment dans les rhinorrhées d’origine otogène, extériorisées via la trompe d’Eustache) et postérieur de la base du crâne. Elle peut être liée à un traumatisme crânien, à une effraction de la base du crâne lors d’une chirurgie des sinus ou d’un abord neurochirurgical, ou à une érosion osseuse provoquée par une lésion congénitale (comme la méningo-encéphalocèle), une lésion bénigne (mucocèle), ou une tumeur maligne. Dans certains cas, aucune cause n’est retrouvée, et on parle de rhinorrhée idiopathique : un surpoids est alors fréquemment retrouvé, probablement à l’origine d’une hypertension intracrânienne relative.

En rhinologie, la méningocèle est une hernie des tissus méningés (dure-mère et arachnoïde) dans les cavités nasales et sinusiennes. Lorsque le tissu cérébral fait également hernie dans la méningocèle, on parle de méningo-encéphalocèle. La plupart des méningocèles sont d’origine congénitale et leur cause est inconnue. Chez l’adulte, nombre de méningocèles sont spontanées, et peuvent alors être rattachées à une hypertension intracrânienne chronique, souvent associée à un surpoids. Certaines méningocèles sont acquises, et se développent alors au niveau d’un défect osseux post-traumatique ou post-chirurgical de la base du crâne. Les sites de prédilection sont les zones de faiblesse de la base du crâne : foramen cæcum, lame criblée, toit de l’ethmoïde, paroi postérieure du sinus frontal, canal de Sternberg du sphénoïde.

Les pathologies infectieuses aiguës rhinosinusiennes sont extrêmement fréquentes. La pathogénie repose en général sur 2 mécanismes possibles : dans le premier cas, l’infection débute dans la fosse nasale (rhinite, d’origine virale dans l’extrême majorité des cas), puis diffuse secondairement à un ou plusieurs sinus paranasaux : on parle de sinusite rhinogène ; dans les autres cas, l’infection apparaît d’emblée dans la cavité sinusienne, du fait d’un facteur favorisant local : sinusite maxillaire d’origine dentaire, sinusite frontale en rapport avec une sténose du canal nasofrontal… Les germes les plus fréquents dans les sinusites bactériennes sont le pneumocoque, Hæmophilus influenzæ, Moraxella catarrhalis et les staphylocoques. Seuls les sinus ethmoïdaux sont présents dès la naissance ; les sinus maxillaires, sphénoïdaux et frontaux se développent au cours de la petite enfance, et ne sont en général pas le siège d’une sinusite avant l’âge de 6 ans. La gravité des rhinosinusites est variable : si, dans la majorité des cas, l’infection reste limitée aux fosses nasales et aux sinus paranasaux, leur situation anatomique expose à des complications locorégionales potentiellement sévères, orbitaires et intracrâniennes.

Les rhinosinusites chroniques sont définies par la présence d’une atteinte chronique des cavités rhinosinusiennes durant plus de 3 mois. Dans les formes localisées, les causes infectieuses sont au premier plan. Les rhinosinusites chroniques diffuses peuvent être primitives, et sont alors divisées en 3 groupes : les rhinosinusites d’origine allergique, non allergique ou mixtes ; plus rarement, elles peuvent être secondaires, entrant alors dans le cadre d’une maladie générale (mucoviscidose, sarcoïdose, granulomatose avec polyangéite [Wegener], virus de l’immunodéficience humaine [VIH], lymphome…).

L’aspergillome sinusien est un corps étranger d’origine fongique qui se forme le plus souvent dans le sinus maxillaire, mais peut également toucher le sinus sphénoïdal et les autres sinus. Il s’agit donc d’une pathologie infectieuse bénigne, mais dont la croissance progressive peut dans certains cas altérer les parois du sinus, et prendre un aspect « pseudo-tumoral ». L’aspergillome peut toucher tous les adultes, même immunocompétents. Il est à différencier de l’aspergillose invasive de l’immunodéprimé, où les filaments sont retrouvés non plus sous forme de conglomérat dans la lumière du sinus mais bien au sein des tissus (muqueuse, os). Le seul facteur de risque identifié est la présence de matériel étranger d’origine dentaire dans les aspergillomes du sinus maxillaire.

La polypose nasosinusienne est une atteinte chronique diffuse et bilatérale des cavités rhinosinusiennes caractérisée par l’apparition de polypes œdémateux qui prédominent dans la région de l’ethmoïde. Elle peut être primitive (associée à un asthme et à une intolérance à l’aspirine dans la triade de Widal), ou secondaire à une pathologie générale (mucoviscidose, dyskinésie ciliaire primitive). C’est une pathologie relativement fréquente, puisque sa prévalence dans la population générale est de l’ordre de 2 %. Sa physiopathogénie, bien que largement explorée, reste encore mal comprise ; elle pourrait reposer sur des facteurs génétiques, allergiques, infectieux bactériens ou fongiques.

La perception des goûts et des odeurs met en jeu des systèmes sensoriels distincts. Néanmoins, la dégustation des aliments mobilise ces deux systèmes, et il est parfois difficile de différencier troubles du goût et de l’odorat chez les patients.
La perception olfactive passe par la reconnaissance de molécules odorantes par le neuro-épithélium olfactif qui tapisse la lame criblée et la partie haute de la cloison, du cornet moyen et du cornet supérieur. Les molécules odorantes peuvent être véhiculées par voie antérieure (ou narinaire), lors de l’inspiration nasale, ou par voie postérieure, lors de la mastication et de la déglutition ; elles se fixent sur le mucus qui tapisse la placode olfactif. Les récepteurs olfactifs sont de petits neurones bipolaires qui franchissent la lame criblée et transmettent l’information olfactive aux neurones du bulbe olfactif, puis au rhinencéphale. Si l’odorat implique avant tout le nerf olfactif, première paire crânienne, il existe aussi une composante trigéminale dans la perception des odeurs.
Dans la perception gustative, les récepteurs sensoriels se trouvent dans les bourgeons gustatifs au sein des papilles fongiformes, calliciformes et foliées ; le signal est transmis aux fibres nerveuses au pôle basal de chaque bourgeon. Les fibres des deux tiers antérieurs de la langue rejoignent le nerf intermédiaire de Wrisberg (VII bis) par la corde du tympan et le nerf lingual et se terminent dans le noyau gustatif (noyau du tractus solitaire) ; les fibres du tiers postérieur de la langue envoient leurs fibres vers le nerf glossopharyngien (IX) ; les quelques bourgeons pharyngés envoient leur fibre vers le nerf vague (X).

Partie 3 - Pathologie cervicale

Tous les éléments constituants du cou peuvent être à l’origine d’une tuméfaction cervicale, mais c’est l’adénopathie qui est le plus souvent en cause dans les tuméfactions latérales du cou. L’essentiel est de savoir suspecter une étiologie maligne.

Les cancers du larynx sont des cancers fréquents (5 % des cancers en France), secondaires au tabagisme chronique. Leur prise en charge a largement changé depuis une vingtaine d’années. Le traitement de référence était autrefois la chirurgie, qu’elle soit partielle, préservant le larynx et la fonction, ou totale. Le paradigme thérapeutique a été bouleversé par l’avènement de la radio-chimiothérapie, qui permet une survie comparable à l’association de la chirurgie et de la radiothérapie avec une préservation laryngée dans environ deux tiers des cas à 2 ans. De plus, aujourd’hui, de nouvelles techniques d’exérèse par voie endoscopique émergent, qu’elles soient basées sur la chirurgie laser par les voies naturelles ou sur la chirurgie robotisée.

Le larynx possède différents rôles :

– émission sonore : la vibration des cordes vocales produit un son fondamental, modifié par les résonateurs sus-jacents (pharynx, fosses nasales) ;

– respiration : les mouvements d’ouverture et de fermeture de la glotte sont synchrones des mouvements respiratoires. Les cordes vocales s’ouvrent lors de l’inspiration, et se ferment lors de la phonation, de la déglutition et également lors de la toux ;

– protection des voies aériennes : le larynx a un rôle de sphincter qui repose sur la fermeture du plan glottique et l’ascension du larynx sous la base de langue. Enfin, l’efficacité de la toux suppose l’intégrité du sphincter laryngé (expiration forcée contre une glotte fermée).

Les cancers de l’hypopharynx se distinguent des cancers du larynx par la gravité de leur pronostic, leur diagnostic souvent tardif, leur caractère très lymphophile et métastatique, le mauvais état général habituel des patients et la fréquence des localisations cancéreuses synchrones et métachrones au niveau des voies aérodigestives supérieures (VADS).

Les cancers de l’oropharynx représentent en France environ 30 % des cancers buccopharyngés. Comme tous les cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS), ils sont essentiellement masculins et favorisés par l’alcoolo-tabagisme. A été mis en évidence l’implication fréquente des papilloma virus (HPV) dans un grand nombre de ces tumeurs. Ce trait est désormais systématiquement recherché, car il a une valeur pronostique et prédit une meilleure réponse à la radiothérapie, à tel point que ce trait devrait être pris en compte dans la prochaine classification TNM.

Au plan anatomique, l’oropharynx est situé en arrière de la cavité buccale et communique en haut avec le nasopharynx ou cavum et en bas avec l’hypopharynx. Il est composé latéralement par les loges amygdaliennes, en arrière par une paroi postérieure, en avant par la base de la langue. Il est limité en haut et en avant par le voile du palais et la luette. Chacune de ces quatre localisations peut être le siège d’une tumeur mais l’envahissement par continuité des régions avoisinantes n’est pas rare.

La cavité buccale est un site essential de la tête et du cou impliqué dans la parole, la déglutition, et l’aspect du visage. Anatomiquement, la cavité buccale est formée de la muqueuse labiale, de la langue mobile, du plancher buccal, de la gencive du maxillaire et de la mandibule, du trigone rétromolaire, de la muqueuse buccale et du palais dur.

En dépit de sa proximité avec l’oropharynx, la cavité buccale est singulière en termes d’étiologies, de prise en charge et de pronostic. En dépit de progrès en termes de « préservation d’organe » au niveau de l’oropharynx et du larynx, le cancer de la cavité buccale demeure une maladie chirurgicale. Par ailleurs, en dépit des progrès de la chirurgie, des traitements adjuvants, de la compréhension des mécanismes moléculaires de l’oncogenèse, le pronostic demeure sombre, en particulier pour les lésions découvertes à un stade avancé.

Le pronostic global est de l’ordre de 60 % à 5 ans, ce qui reflète mal l’extrême variation depuis 82 % pour les petites lésions jusqu’à 10 % pour les lésions avancées. Le contrôle locorégional des tumeurs de la langue est particulièrement difficile, compte tenu de la lymphophilie de cette tumeur, avec un essaimage souvent bilatéral et, d’autre part, du fait de l’absence de barrière anatomique à l’extension tumorale le long des faisceaux musculaires.

Le type histologique le plus fréquent est le carcinome épidermoïde. Il représente 25 % environ des cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS).

Peu fréquent chez les Européens, le cancer du cavum constitue un problème de santé publique en Asie du Sud-Est et dans le Maghreb. Il est caractérisé par son type histologique (undifferentiated carcinoma of nasopharyngeal type [UCNT]), une épidémiologie sans rapport avec l’alcool et tabac, mais en revanche avec le virus d’Epstein-Barr (EBV), une distribution endémique dans certaines régions du monde, des facteurs génétiques, viraux et environnementaux, la fréquence des métastases ganglionnaires et à distance et l’efficacité de la radiothérapie et de la chimiothérapie.

Il existe deux tableaux distincts. La paralysie d’une seule corde vocale se traduit par une dysphonie et éventuellement par quelques fausses routes, mais cette pathologie ne met pas en jeu le pronostic vital. En revanche la paralysie des deux cordes vocales réalise un tableau dramatique marqué, en fonction de la position des cordes vocales paralysées, soit par une dyspnée de repos, majorée au moindre effort, à voix normale quand les cordes vocales sont en adduction, soit par une aphonie s’accompagnant de fausses routes majeures quand les cordes sont en abduction.

La paralysie peut être liée soit à une atteinte d’un nerf périphérique, qu’il s’agisse du nerf pneumogastrique ou du nerf laryngé inférieur encore appelé nerf récurrent, soit à une atteinte centrale touchant le noyau du tractus solitaire.

Les sténoses laryngotrachéales sont définies comme des rétrécissements de calibre de la filière du larynx et/ou de la trachée. Les atteintes laryngotrachéales varient en fonction de leur localisation, leur sévérité, leur durée, leur cause et leur étendue.

Les kystes et fistules cervicofaciaux congénitaux sont des malformations rares, leur formation peut s’expliquer par la persistance d’une disposition anatomique normalement transitoire au cours de la formation de l’embryon. Le kyste du canal thyréoglosse est la malformation la plus fréquente, suivie des fentes branchiales et des kystes dermoïdes. Dans cette revue, nous discutons les principales formes cliniques de kystes et fistules cervicofaciaux congénitaux et leurs modalités de prise en charge.

Les tumeurs de la parotide représentent 0,6 % des tumeurs humaines, 3 % des tumeurs cervicofaciales et 80 % des tumeurs des glandes salivaires [1]. Elles sont bénignes dans 80 % des cas.

Lithiase de la glande sous-mandibulaire

Épidémiologie

C’est la lithiase salivaire la plus fréquente (9 cas sur 10). Elle s’observe à partir de l’âge de 2 ans, mais survient essentiellement à l’âge adulte. La taille des calculs est variable allant de moins de 1 mm de diamètre à plusieurs centimètres. Ces calculs sont uniques, voire multiples. Ils sont situés soit dans les canaux glandulaires soit dans le canal excréteur. Les formes bilatérales sont rares.

Les pathologies inflammatoires des glandes salivaires ou sialoses sont des affections salivaires chronique ni infectieuses, ni tumorales, qui se manifestent par des hyperplasies et par un déficit salivaire. Elles regroupent les atteintes glandulaires de nature dystrophique et nutritionnelle, les sialoses non systémiques et les diverses maladies de système où l’atteinte des glandes salivaires est plus ou moins fréquente.

L’achalasie est une pathologie liée à l’atteinte du sphincter supérieur de l’œsophage (SSO) responsable d’une dysphagie, son évolution peut conduire au diverticule de Zenker. Le sphincter supérieur de l’œsophage ou bouche œsophagienne assure la séparation entre l’hypopharynx et l’œsophage. Il est constitué par les fibres des muscles cricopharyngien et constricteur inférieur du pharynx. On décrit deux zones de faiblesses au-dessus et au-dessous du cricopharyngien, le triangle de Killian et le triangle de Laimer. Le nerf cricopharyngien, issu du nerf récurrent, innerve le muscle cricopharyngien et en partie le constricteur inférieur de l’œsophage. Le sphincter supérieur de l’œsophage se contracte lors de phonation et se relâche lors de la déglutition

Le diverticule pharyngo-œsophagien est une hernie acquise de la muqueuse pharyngo-œsophagienne postérieure à travers un hiatus limité en haut par les fibres inférieures du muscle constricteur du pharynx et en bas par le muscle cricopharyngien.

Les « cellulites », dans la littérature française, ou fasciites des Anglo-Saxons, sont des infections des espaces profonds de la face et du cou. Ces espaces sont compartimentés par les trois aponévroses cervicales superficielle, moyenne et profonde. Les espaces de glissement pour la contraction et les mouvements des muscles correspondent aux voies de diffusion de ces infections cervicales profondes. Ils sont constitués de tissu cellulo-adipeux, d’où le terme de cellulite. Les espaces aponévrotiques n’offrent pas de barrière anatomique à la diffusion de l’infection le long des différents espaces qui s’étendent de la base du crâne au médiastin. Dans la plupart des cas vus en ORL, l’atteinte cervicale se fait depuis l’axe viscéral du cou, de sorte que la peau est longtemps normale, à la différence des pathologies dermatologiques qui, à partir d’une dermo-hypodermite, vont s’étendre au cou en profondeur.