S32-P01-C15 Coqueluche de l’enfant et de l’adulte (Chapitre archivé)

S32-P01-C15 Coqueluche de l’enfant et de l’adulte (Chapitre archivé)

S32

Maladies infectieuses

Olivier Lortholary

Chapitre S32-P01-C15

Coqueluche de l’enfant
et de l’adulte

Dominique Gendrel
ATTENTION : Les informations contenues dans ce chapitre sont susceptibles d’être obsolètes, il existe une version plus récente de ce chapitre.
Lien vers la mise à jour

 

La coqueluche a été une cause importante de mortalité infantile qui a chuté brutalement dès la fin des années 1950 avec la généralisation de la vaccination dans l’enfance. Le germe continue néanmoins de circuler tant chez l’enfant que chez l’adulte car l’immunité spécifique, qu’elle soit due aux vaccins ou à la maladie naturelle, est limitée dans le temps. L’infection à Bordetella pertussis n’est plus un problème seulement pédiatrique mais concerne aussi l’adulte qui, même avec une symptomatologie clinique atténuée, contribue à transmettre le germe.

L’effet de la vaccination a été spectaculaire sur la mortalité et la maladie dans sa forme classiquement décrite et enseignée. Aux États-Unis, le taux d’attaque des coqueluches typiques passait de 150 à 200/10 000 dans les années 1940 à 0,5 à 1 dans les années 1970. En France, on estimait en 1950, le nombre des coqueluches cliniques à 7 000 par an avec 120 décès, alors qu’en 1970, les chiffres étaient tombés respectivement à 1 500 et 20. En 1986, année où la France a décidé d’interrompre la surveillance active de la coqueluche, on n’observait plus que quelques dizaines de cas de formes typiques par an avec moins de 5 décès.

En se basant sur la clinique classique, on sous-estime la réalité de l’infection à Bordetella pertussis. Les formes peu symptomatiques avec une toux modérée, ont toujours existé, y compris avant l’ère vaccinale, comme l’ont montré les enquêtes familiales autour d’un cas-index. Avec la généralisation des vaccins qui contribue à l’augmentation du taux global d’immunité dans toute la population, les formes atténuées et atypiques sont devenues la règle. Les patients avec une toux peu marquée apparemment banale ne sont pas identifiés comme infectés par Bordetella pertussis car on ne pense pas à la coqueluche, et aucune confirmation bactériologique n’est demandée ; pourtant ils peuvent être contagieux et jouent un rôle majeur dans la transmission du germe.

Résurgence de la coqueluche

On évoque depuis plusieurs dizaines d’années une résurgence de la coqueluche, mais son importance, voire sa réalité, font débat. Il s’agit dans tous les pays où une surveillance a été organisée (qui sont également ceux qui vaccinent le mieux) d’une augmentation du nombre de formes atypiques ou atténuées bactériologiquement confirmées, mais sans augmentation des cas sévères ni de la mortalité.

La généralisation de la PCR spécifique tant chez l’enfant que chez l’adulte explique en partie cette apparente augmentation car on obtient ainsi la preuve bactériologique de l’infection chez des patients avec une clinique atypique, patients qu’on n’aurait jamais exploré pour rechercher une coqueluche il y a 10 ans car on ne disposait pas d’examens aussi fiables ni aussi facile à réaliser. L’interprétation abusive des résultats purement sérologiques a aussi joué un rôle. On a beaucoup trop considéré dans les années 1980-2000 qu’un taux élevé d’anticorps sur un prélèvement unique était un bon signe de coqueluche active, sans tenir compte de la date des dernières vaccinations, de la clinique ni de la qualité des antigènes utilisés pour les tests, tant les kits sérologiques disponibles étaient – et restent – divers et hétérogènes.

Les premiers vaccins, dits à germes entiers car produits à partir d’une suspension de bacilles inactivés par la chaleur, se sont montré remarquablement efficaces. Mais ils ont été accusés d’effets secondaires graves et dans de nombreux pays industrialisés remplacés par des vaccins acellulaires, mieux tolérés. Ceux-ci, avec des antigènes, toxines et autres protéines produits et isolés séparément sont cependant moins immunogènes que les vaccins à germes entiers. Ce remplacement au cours des années 1990-2000 a été, partout où il a eu lieu, suivi d’une augmentation faible mais bien réelle des cas prouvés de coqueluche.

Infection à Bordetella pertussis et maladie

La généralisation des vaccins a entrainé dans les pays industrialisés une chute spectaculaire et rapide de la mortalité. Cette généralisation ne se fait que lentement dans les pays en développement, et pour la période 2010-2015, l’OMS considérait que la coqueluche était encore responsable de 200 000 morts par an, la plupart ayant moins de 2 ans, avec une forte disparité Nord/Sud.

Germe de la coqueluche

La coqueluche est une maladie uniquement humaine hautement contagieuse due à Bordetella pertussis, ou bacille de Bordet-Gengou, germe à Gram négatif se transmettant facilement par voie respiratoire. Bordetella parapertussis qui n’est impliqué que dans 2 % des coqueluches en France n’exprime pas toutes les toxines de Bordetella pertussis et les patients infectés ont une clinique beaucoup moins typique. La PCR peut quelquefois retrouver dans le rhinopharynx des enfants ou des adultes l’ADN de Bordetella holmesii, germe impliqué dans des bactériémies chez des patients aspléniques ou porteurs de déficits immunitaires. Bordetella bronchoseptica est un germe animal exceptionnellement isolé dans les prélèvements respiratoires humains.

Toxines et adhésines

La pathogénie de la coqueluche est due aux toxines de Bordetella pertussis. La principale est la toxine pertussique (PT). On n’a jamais réussi à prouver par des modèles animaux, que la PT était directement responsable de la toux caractéristique de la coqueluche. Cependant, les infections humaines à B parapertussis, germe proche qui porte l’équipement génétique de production de la PT mais ne l’exprime pas, ne donnent qu’une maladie atténuée, sans quintes marquées ni reprise inspiratoire. La PT est responsable de l’hyperlymphocytose au cours de l’infection par Bordetella pertussis du jeune enfant.

Cette absence de démonstration expérimentale n’empêche pas de considérer que la coqueluche est une maladie infectieuse de type toxinique. C’est-à-dire que l’éradication du germe chez un individu n’entraine pas immédiatement une disparition des quintes car l’imprégnation toxinique persiste, alors que chez les patients qui sont immunisés, le vaccin contenant la PT comme antigène, l’immunité anti-toxinique protège de la toux coquelucheuse.

Les adhésines sont des protéines de paroi du germe qui participent à la colonisation du tractus respiratoire. Elles sont fortement immunogènes et constituent des éléments importants des vaccins acellulaires. Les principales sont la pertactine, l’hémaglutinine filamenteuse et les protéines fimbriales. Leur rôle précis dans la pathogénie et l’expression clinique de la maladie semble peu important. L’infection due à des souches de Bordetella pertussis dépourvues de pertactine ne cause pas de coqueluche avec une symptomatologie moins sévère que celle due aux souches qui la portent.

Maladie coquelucheuse

La maladie provoquée par Bordetella pertussis possède un nombre de caractéristiques qui la différencient de toutes les infections respiratoires sévères observées chez l’homme. Le signe principal est une toux paroxystique non productive survenant par quintes avec reprise inspiratoire bruyante, épisodes souvent nocturnes séparés par des périodes de totale normalité respiratoire sans fièvre.

L’infection est non fébrile et non inflammatoire. Les autopsies pratiquées à l’époque prévaccinale ne montraient pas de réactions inflammatoires péribronchiques, même si on notait quelques hémorragies intra-alvéolaires. La fièvre ne fait pas partie du tableau clinique de la coqueluche. Sa présence au cours d’une infection à Bordetella pertussis doit faire rechercher une infection associée à d’autres pathogènes, bactéries ou virus.

Classiquement, on décrivait chez l’enfant non vacciné, après une incubation silencieuse de 7 à 10 jours, la phase catarrhale d’une semaine avec rhinorrhée et toux. La phase suivante paroxysmale de 2 à 4 semaines était marquée par une toux émétisante, souvent nocturne, avec quintes et reprise inspiratoire cyanogène bruyante (le chant du coq) parfois très mal supportée, sans manifestation respiratoire entre les paroxysmes. La phase de convalescence avec décroissance progressive de la toux pouvait durer plusieurs semaines.

On peut encore rencontrer de tels tableaux chez des enfants non vaccinés pour diverses raisons, mais la durée des signes cliniques, et leur sévérité, a considérablement diminué avec la prescription d’antibiotiques dès le diagnostic posé. Les jeunes nourrissons de moins de trois mois n’ayant pas encore reçu la première dose de vaccin anticoquelucheux constituent actuellement la principale population à risque de coqueluche sévère.

Immunité après infection naturelle ou après vaccination

Immunité après infection naturelle

L’infection naturelle à Bordetella pertussis protège pendant 10 ans environ. Des isolements longs en chambre seule étaient classiquement prescrits pour éviter la contagion jusque dans les années 1980 car on connaissait mal la durée de portage du germe. Tout a changé avec les traitements antibiotiques systématiques des malades et de l’entourage. Actuellement, les recommandations françaises et internationales sont de considérer que le patient n’est plus contagieux après 3 à 5 jours de traitement par macrolides.

Immunité après vaccination

Les premiers vaccins utilisés ont été les vaccins à germes entiers fabriqués avec plusieurs souches différentes de Bordetella pertussis inactivées par la chaleur, avec une durée de protection estimée à 8 ans.

La tolérance des vaccins à germes entiers a été jugée médiocre au cours des années 1970 car des encéphalopathies fébriles, dont plusieurs mortelles, leur ont été attribuées. Plusieurs pays, en particulier le Japon et la Suède, ont alors abandonné la vaccination systématique des enfants, ce qui a été immédiatement suivi par une augmentation brutale des cas de coqueluches sévères avec quelques décès.

Pour ces raisons, de nombreux pays occidentaux ont décidé d’utiliser exclusivement les vaccins coquelucheux acellulaires qui sont mieux tolérés, mais moins immunogènes. Ceux-ci, ont une composition antigénique, toxines et adhésines, différente d’un fabricant à l’autre avec des concentrations variables. Les vaccins acellulaires sont les seuls employés dans la plupart des pays occidentaux. De nombreux autres pays utilisent des vaccins à germe entier fabriqués de façon très contrôlée et qui semblent bien tolérés.

La durée de protection des vaccins anti-coquelucheux étant limitée, des rappels sont nécessaires et le respect du calendrier vaccinal passe au premier plan. Les rappels conseillés en France chez le jeune enfant, l’adolescent et le jeune adulte sont indispensables pour protéger l’individu et limiter la circulation du germe.

Coqueluche à l’ère vaccinale

Protection et clinique hétérogènes

Les adultes vivant dans des pays occidentaux ont été pour beaucoup vaccinés avant 2 ans, mais les conseils de rappel leur ont été appliqués de façon très variable. La couverture vaccinale reste insuffisante dans de nombreuses régions pour l’immunisation avant 2 ans et trop basse pour les rappels. La protection dans une population est donc peu prévisible et toujours hétérogène. L’infection provoquée par Bordetella pertussis engendre une symptomatologie clinique tout aussi hétérogène, avec nombre de formes atténuées chez des patients partiellement immunisés. Mais avec une constante : tout porteur du germe est un contaminateur potentiel pour l’entourage.

On dispose de données récentes sur la réalité de la maladie. Au cours de l’épidémie de 2010 en Californie, malgré une couverture vaccinale par vaccin acellulaire, supérieure à 90 % chez les moins de 2 ans, 9 500 cas ont été enregistrés avec 10 décès, tous de moins de 2 mois. L’épidémie anglaise de 2012, avec une couverture par vaccin acellulaire de plus de 92 % chez le nourrisson a provoqué 9 décès, tous ayant moins de 1 an.

Le réseau hospitalier français RENACOQ a montré qu’entre 1996 et 2012 (le vaccin acellulaire ayant été introduit en France en 1998) 3 318 cas ont été enregistrés chez des nourrissons de 0 à 5 mois avec 37 décès dont 32 avaient moins de 2 mois. On peut espérer des progrès car la couverture vaccinale initiale (vaccin obligatoire à 2, 4 et 11 mois) est estimée actuellement à plus de 95 %. Surtout la France est un des pays à appliquer largement les rappels de l’enfance et de l’adolescence et à les contrôler à travers le système scolaire.

Chez l’enfant de moins de 1 an

Les formes sévères de coqueluche et les rares décès ne s’observent, dans les pays industrialisés, qu’avant l’âge de 6 mois chez des nourrissons non vaccinés et après une contamination familiale.

La suspicion de coqueluche chez le nourrisson doit conduire à une hospitalisation immédiate dans une structure proche d’un service de soins intensifs, et en chambre seule pour isoler le malade et réduire les contacts de la famille, potentiellement contagieuse, avec les autres patients hospitalisés, le personnel et les visiteurs.

Les signes principaux sont une toux paroxystique et émétisante, suivie d’une reprise inspiratoire, cyanogène et dangereuse car un arrêt cardio-respiratoire brutal est toujours menaçant. Les apnées font toute la gravité de la coqueluche du nourrisson. Elles peuvent sembler isolées tant l’épisode de toux qu’elle suivent peut-être bref. Les vomissements associés et les fausses routes alimentaires sont dangereux avec le risque d’inondation des voies respiratoires rendant l’alimentation par sonde digestive nécessaire.

La toux peut persister une semaine, souvent quinteuse et nocturne, malgré la prescription initiale de macrolides car l’imprégnation toxinique subsiste quelque temps. Les antibiotiques réduisent un peu la durée des symptômes, mais surtout ils éradiquent Bordetella pertussis du rhinopharynx : la contagiosité du patient s’arrête en quelques jours, mais pas celle des membres de la famille porteurs du bacille si on ne les traite pas.

On sait maintenant que des malaises graves, apparemment isolés, du nourrisson peuvent être dus à la coqueluche. Des études reprenant les morts subites inexpliquées du jeune enfant, ont montré dans l’arbre respiratoire des pièces d’autopsie la présence d’ADN de Bordetella pertussis, sans que la maladie n’ait jamais été soupçonnée avant le décès.

Il est fréquent de retrouver une hyperlymphocytose souvent > 20 000 lors de la coqueluche de l’enfant. Elle n’est pas constante mais c’est un excellent signe qui doit conduire à une PCR de coqueluche chez tout nourrisson tousseur avec lymphocytes élevés. En cas de malaise grave apparemment isolé, c’est un excellent signe indirect de coqueluche qui doit conduire à la PCR chez le patient et dans son entourage. L’hyperlymphocytose de l’infection à Bordetella pertussis est moins fréquente après l’âge de 1 an et rare chez le grand enfant et l’adolescent.

Les coinfections de Bordetella pertussis avec les pathogènes bactériens ou viraux habituellement rencontrés dans la première année de vie ne sont pas rares, mais l’association au Virus Respiratoire Syncitial (VRS) est, elle, très fréquente (Tableau S32-P01-C15-I). Il faut rechercher une coqueluche lors des bronchiolites à VRS au moindre doute car des décisions de prophylaxie doivent être prises pour l’entourage. La PCR systématique de coqueluche demandée chez les enfants de moins de 6 mois hospitalisés avec une toux, une bronchiolite ou après un malaise grave est une attitude adoptée par beaucoup et n’est pas abusive.

 

Tableau S32-P01-C15-I Résultats de la PCR en temps réel pour Bordetella pertussis chez 86 nourrissons âgés de moins de 6 mois hospitalisés avec toux à l’admission et chez leur sujets contacts familiaux pendant une saison hivernale (Hôpital Saint-Vincent de Paul, Raymond J et al Clin Microb Inf 2007)

Groupe 1 :

Cas Index POS

Groupe 2 :

Cas Index NEG

Famille POS

Groupe 3 :

Cas Index NEG

Famille NEG

Cas index n =

PCR positives dans la famille

Co-infection VRS

Admission :

Apnée

Toux quinteuse

Toux émétisante

Hospitalisation en réanimation

Toux quinteuse dans les suites

30

25/30

25/30 (83,3 %)

16

5

9

10

12

12

12/12

8/12 (66,6 %)

5

2

5

4

6

44

0/44

28/44(63,6 %)

13

4

27

5

0

PCR positive chez les sujets-contacts

Contacts testés, n = 85 (gr 1) 37 (gr 2) 83 (gr 3)

Mère

14/30 (46,6 %)

9/12 (75 %)

0/41

Père

9/25 (36 %)

7/10 (70 %)

0/22

Fratrie

11/27 (40,7 %)

3/11 (27,2 %)

0/20

Grand-parents

0/3

1/4

0

Toux chez les sujets contacts

Pas de toux

Toux < 5 jours

Toux > 5 jours

Toux quinteuse

28

7

32

2

18

2

14

1

34

8

18

0

Données cliniques absentes

16

2

23

 

Le diagnostic rapide de coqueluche chez l’enfant comme chez l’adulte ne repose que sur la PCR. La culture microbienne est longue et difficile. La sérologie n’a aucune signification sur un seul prélèvement et donne des résultats aléatoires selon les kits : elle ne peut en aucun cas contribuer au diagnostic en urgence. La sérologie anticoquelucheuse n’est d’ailleurs plus un examen remboursé par la Sécurité Sociale française en routine pour le diagnostic.

La PCR est indispensable, mais elle est parfois négative sur le premier prélèvement. La coqueluche du nourrisson résultant toujours d’une contamination par l’entourage, il est nécessaire de prélever la famille. En cas de suspicion de coqueluche, la positivité de la PCR chez un proche affirme le diagnostic, même si le résultat est initialement négatif chez le patient suspect.

Le Tableau S32-P01-C15-I donne un bon exemple de ce qu’est la coqueluche du jeune enfant hospitalisé, à l’heure actuelle. Les résultats rapportés sont ceux de nourrissons de moins de 6 mois hospitalisés dans un hôpital parisien (St Vincent de Paul) pendant la saison hivernale de 2005 et de leur famille. La PCR coqueluche était demandée à l’admission en cas de toux apnéisante ou non. Les principaux enseignements fournis par cette série, semblable à ceux de toutes les études publiées, sont la grande hétérogénéité des signes cliniques chez le patient-index et la quasi-constance de l’infection dans la famille proche.

Entourage du nourrisson infecté et antibioprophylaxie

Toutes les études autour d’un cas de coqueluche du nourrisson sont concordantes : la transmission se fait par la famille ou des proches. Beaucoup toussent peu mais ils sont infectés et contagieux, comme le prouve la PCR, certains étant même des porteurs asymptomatiques. Les sujets de l’entourage avec quintes évocatrices sont définis comme « cas épidémiologiques » quel que soit le résultat des examens biologiques : ils sont à considérer comme infectés et contagieux.

La première démarche et la plus importante autour d’un cas avéré est d’éviter que la transmission du germe ne se pérennise. Il faut traiter à titre prophylactique par 3 à 5 jours de macrolides la famille et tout l’entourage. Les proches qui ne toussent pas doivent aussi recevoir des antibiotiques en prophylaxie car les porteurs asymptomatiques ne sont pas rares. Pour beaucoup, il faut traiter tout l’entourage sans faire auparavant de recherche bactériologique.

Les épidémies de coqueluche dans les communautés d’enfants sont rares en France. Les crèches n’acceptent que les nourrissons à jour de leur programme vaccinal et l’entrée à l’école maternelle impose une vaccination complète. En revanche, les principaux lieux d’exposition à la coqueluche sont, comme pour toutes les maladies infantiles contagieuses, les consultations hospitalières et les salles d’attente des médecins.

Nombre de parents qui vont contaminer au foyer leur nourrisson non encore vacciné font partie du personnel soignant. Ils ont acquis l’infection auprès de leurs patients, adultes ou enfants, sont paucisymptomatiques mais ils ne sont pas à jour de leurs vaccins.

Coqueluche de l’adolescent et de l’adulte

Elle est très hétérogène car on connait mal le poids réel de l’infection coquelucheuse dans la communauté en dehors de quelques enquêtes très ciblées.

Coqueluche de l’adolescent

Des épidémies sont décrites dans des collectivités d’adolescents vaccinés au cours de la petite enfance mais sans rappel à 6 et 11 ans. Même avec une transmission importante, moins du tiers des patients ont une toux quinteuse, la plupart ont une toux banale, et plus de 10 % n’ont aucune toux malgré la présence du bacille dans le rhinopharynx. L’infection par Bordetella pertussis à l’adolescence est plus rare en France que dans la plupart des autres pays car le rappel à 11 ans avec un vaccin combiné diphtérie-tétanos-poliomyélite-coqueluche, introduit en 1998 dans les programmes français, est une recommandation bien suivie.

Coqueluche de l’adulte

L’infection par Bordetella pertussis de l’adulte est sous-estimée car elle n’est pas suffisamment recherchée, beaucoup considérant encore que la coqueluche est uniquement une maladie de l’enfant, mais aussi faute de symptomatologie clinique typique. La toux est banale, rarement quinteuse mais elle est persistante. Une toux ancienne d’une à deux semaines même bien supportée doit alerter. Si l’infection n’est pas identifiée, le patient continuera de tousser en répandant le germe, jusqu’à ce qu’il reçoive des macrolides. Les différentes enquêtes réalisées en France chez des adultes de la communauté par des généralistes dans les années 1990 à 2000 ont été centrées sur les patients toussant de façon prolongée. L’infection est loin d’être rare : 20 % environ des patients toussant depuis plus de 7 jours sont infectés par Bordetella pertussis. Quelques études plus récentes montrent que ce chiffre n’augmente pas.

L’infection est possible dans les groupes d’adultes les plus divers, travail ou loisir, ainsi qu’au plan individuel Tous les cas groupés de toux dans une communauté d’adultes doit faire rechercher une coqueluche. Des micro-épidémies sont décrites dans les établissements de séjour pour personnes âgées quel que soit le degré de leur dépendance. Dans les quelques enquêtes faites en EPHAD autour de cas groupés, on a constaté que tous les pensionnaires ne toussaient pas avec la même intensité, et beaucoup, probablement immunisés, n’avaient aucun signe. Les soignants peuvent participer à la transmission, comme cela est souvent décrit : les recommandations les concernant (vaccin à 25, 45 et 65 ans pour le personnel des EPHAD) doivent donc être bien suivies.

La découverte chez un patient d’une infection à Bordetella pertussis impose évidemment l’antibioprophylaxie de son entourage, quel que soit l’âge des sujets-contacts pour limiter la diffusion du germe.

Calendrier vaccinal : de l’enfant à l’adulte

Il n’existe pas de vaccin anticoquelucheux isolé : toutes les spécialités commercialisées sont associées à d’autres valences vaccinales, au moins anatoxines diphtérique et tétanique et comportant ou non les différentes valences poliomyélite. En France, le vaccin est obligatoire à 2, 4 et 11 mois. Il est recommandé à 6 ans, 11 ans et entre 20 et 25 ans. Une dose entre 35 et 45 ans est conseillée.

Après l’âge de 6 ans, les vaccins employés sont de type « dTcaPolio ou dTca » car ils comportent des doses réduites d’anatoxine diphtérique (d et non D) et d’antigènes coquelucheux acellulaires (ca et non Ca).

Tous les étudiants et professionnels de santé et les personnes s’occupant de la petite enfance doivent recevoir une dose de vaccin coquelucheux acellulaire à 25, 45 et 65 ans.

La couverture vaccinale incluant la coqueluche est de bonne qualité en France jusqu’à 11 ans grâce au contrôle scolaire. Mais elle est insuffisante en ce qui concerne le rappel à 20-25 ans. Pourtant, c’est en vaccinant le jeune adulte qu’on protègera au mieux le père, la jeune mère et son nouveau-né.

Pour éviter au nouveau-né d’être infecté avant 3 mois, plusieurs attitudes ont été proposées, mais aucune ne fait l’unanimité.

La stratégie du « cocooning » consiste à vacciner les proches, et d’abord le père et la fratrie pendant la grossesse si leur dernière injection vaccinale date de plus de 10 ans, et la mère après l’accouchement même si elle allaite. Elle concerne surtout les pays qui vaccinent mal après l’enfance. En France, les rappels de l’adolescence et entre 20 et 25 ans s’intègrent complètement dans cette stratégie.

La vaccination de la mère pendant la grossesse est aussi proposée. Le but est d’éviter à la mère d’être contaminatrice et de lui permettre de délivrer à son nouveau-né une quantité importante d’anticorps par voie transplacentaire. Réalisée avec un vaccin coquelucheux acellulaire combiné aux antigènes tétaniques et diphtériques, elle n’est pas recommandée en France. Dans les pays où elle est pratiquée, elle semble bien tolérée. Une des inconnues reste l’interférence possible avec la production active d’anticorps chez l’enfant quand il devra être immunisé avec les trois antigènes après la naissance.

Conclusion

La coqueluche est une maladie nécessitant une surveillance généralisée et les cas d’infection, quel que soit leur symptomatologie, doivent être rapportés aux autorités sanitaires, comme pour toutes les maladies à prévention vaccinale. Il reste encore trop de situations mal connues, surtout chez les adultes, seuls ou en communauté, et dans les établissements pour personnes âgées. Il faut penser à la coqueluche devant des formes atypiques de l’adulte ou de l’enfant et la diagnostiquer pour traiter l’entourage et limiter la transmission.

Toute la stratégie contre la coqueluche repose sur le respect du calendrier vaccinal incluant les rappels de l’adolescent et de l’adulte et sur l’antibiothérapie du cas index et de son entourage quand un diagnostic est porté.

Bibliographie

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4. TUBIANA S, BELCHIOR E, GUILLOT S, GUISO N, LÉVY-BRUHL D. Renacoq Participants. Monitoring the Impact of Vaccination on Pertussis in Infants Using an Active Hospital-based Pediatric Surveillance Network : Results from 17 Years’ Experience, 1996-2012, France. Pediatr Infect Dis J. 2015, 34 :814-20.
5. Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire. www.santepubliquefrance.fr/revues/beh/bulletin-epidemiologique-hebdomadaire.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Gendrel D. Coqueluche de l’enfant et de l’adulte. In : L Guillevin, L Mouthon, H Lévesque. Traité de médecine, 5e éd. Paris, TdM Éditions, 2020-S32-P01-C15 : 1-4.