S05 Cardiologie

S05 Cardiologie

S05

Cardiologie

Olivier Dubourg

Coordonnateur

Professeur des Universités, Praticien hospitalier, service de Cardiologie, hôpital Ambroise-Paré, Boulogne-Billancourt

Partie 1 - Sémiologie cardiovasculaire et explorations

Interrogatoire

C’est un temps de l’examen trop souvent négligé et pourtant fondamental. Il exige une grande attention et beaucoup de patience : il faut savoir reposer la même question sous une forme différente pour s’assurer qu’elle a été bien comprise et donc qu’elle a reçu la réponse adéquate. Chez un patient malentendant, l’interrogatoire est facilité en plaçant les embouts auriculaires du stéthoscope dans les oreilles et en parlant devant la membrane. D’une façon générale, le patient atteint de maladie grave fournit dès le début de l’entretien des renseignements pertinents tandis que celui qui n’a pas de maladie organique se plaint de symptômes multiples et discordants…

Généralités

Définition

L’électrocardiogramme (ECG) est un tracé qui représente l’évolution de l’activité électrique cardiaque : en abscisse, le temps, dont l’unité utilisée est la milliseconde (ms) ; en ordonnée, la tension électrique ou circulation du champ électrique cardiaque, dont l’unité utilisée est le millivolt (mV).

Cycle électrique cardiaque

L’activité électrique cardiaque prend son origine dans le nœud sinusal (nœud de Keith et Flack) situé sur le toit de l’oreillette droite près de l’orifice de la veine cave supérieure. Les cellules du nœud sinusal correspondent à un tissu spécialisé qui possède une propriété électrophysiologique de dépolarisation spontanée ou automaticité. La vitesse de dépolarisation spontanée est sous l’influence du système nerveux sympathique, qui l’accélère, et parasympathique, qui la ralentit, ce qui détermine la fréquence cardiaque normale (sinusale).

Le front de dépolarisation se transmet ensuite à l’ensemble du massif atrial, d’abord l’oreillette droite, puis l’oreillette gauche par l’intermédiaire du faisceau de Bachmann et du sinus coronaire.

L’échocardiographie-Doppler est une technique d’exploration cardiaque et vasculaire qui repose sur le principe de la génération des ultrasons par des cristaux piézo-électriques et leur pénétration dans l’organisme, se traduisant par la représentation sur un écran en temps réel des différentes structures cardiaques et vasculaires. Ne permettant initialement que l’étude du déplacement de ces structures anatomiques en fonction du temps selon le mode TM (temps-mouvement), l’échocardiographie-Doppler a connu des améliorations techniques ininterrompues depuis les années 1970. Ont été successivement développés le mode bidimensionnel, puis le couplage de l’imagerie au Doppler dans ses différentes modalités (Doppler pulsé spectral, puis à codage couleur, Doppler continu), la voie transœsophagienne permettant de pallier certaines insuffisances de l’échographie transthoracique, l’imagerie de seconde harmonique issue de la technologie des agents de contraste et plus récemment, le Doppler tissulaire et la méthode du speckle tracking, ouvrant la voie au calcul des indices de déformation myocardique. Le plus souvent, les examens sont pratiqués à l’état basal, mais il est également possible d’étudier les modifications physiologiques et de détecter un comportement pathologique au cours de l’échographie dite « de stress », effectuée lors d’un effort physique ou d’une épreuve pharmacologique.

L’un des grands champs d’application des méthodes non invasives d’imagerie cardiaque est la détection de l’ischémie myocardique, c’est-à-dire l’étude de la répercussion des sténoses artérielles des troncs coronaires épicardiques sur la fonction myocardique régionale et globale. Il s’agit de détecter des anomalies de la perfusion ou de la contraction régionale ventriculaire gauche.

L’ischémie est la conséquence d’une mauvaise irrigation du myocarde, c’est-à-dire une insuffisance du débit coronaire qui ne s’élève pas suffisamment en cas d’augmentation des besoins en oxygène, lors d’un effort par exemple, ou qui est réduit spontanément, comme en cas de spasme coronaire. Plus rarement, ce déséquilibre peut survenir lorsque la réserve coronaire est réduite, suite à une élévation des résistances vasculaires, en particulier par dysfonction microvasculaire. Par ailleurs, il faut rappeler que les couches sous-endocardiques sont plus précocement sensibles à l’ischémie que les couches sous-épicardiques, ce qui va influencer la fonction ventriculaire gauche.

Coronarographie

La coronarographie a un triple intérêt, diagnostique en permettant de visualiser la lumière artérielle des artères coronaires, thérapeutique car c’est l’étape préalable indispensable à une éventuelle revascularisation par angioplastie et pronostique en précisant le nombre et la localisation des sténoses coronaires. Bien qu’invasif, car nécessitant une ponction artérielle et exposant le patient aux rayons X, cet examen est devenu sûr, rapide et grevé d’un taux très faible d’accidents. Il est actuellement très largement pratiqué mais réglementairement dans des centres habilités et par des médecins formés et expérimentés.

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque est une technique d’exploration récente, qui doit répondre à la difficulté d’imager un organe mobile et nécessitant donc des techniques d’acquisition rapides et synchronisées à l’ECG. Les évolutions technologiques rapides, la couverture volumique du cœur, l’absence d’irradiation et la caractérisation tissulaire confèrent à l’IRM de réels atouts, et le nombre d’examens ne fait qu’augmenter dans la majorité des centres radiologiques. Cependant, de par sa faible disponibilité et son temps de réalisation élevé, elle ne peut remplacer les autres techniques d’exploration cardiaque. Le but de ce chapitre n’est donc pas de réaliser un recueil exhaustif de sémiologie, mais plutôt de fournir au clinicien un aperçu des indications où l’IRM est actuellement recommandée pour le diagnostic et le suivi de nombreuses pathologies cardiovasculaires.

Holter

L’enregistrement électrocardiographique de longue durée (Holter-ECG) est un examen d’une grande utilité dans la pratique cardiologique. La technologie sur laquelle il repose a considérablement évolué depuis les premières publications de son inventeur, Norman J. Holter, au début des années 1960. Initialement limité à une durée d’enregistrement de 10 heures et à une vitesse de relecture du signal relativement lente, l’enregistrement Holter a bénéficié des progrès technologiques tels que des supports mémoire de plus en plus performants (bandes magnétiques, mémoires solides, puis cartes mémoire), la miniaturisation des boîtiers enregistreurs ainsi que le développement d’algorithmes améliorant l’analyse des données. Si l’indication la plus fréquente reste la recherche de troubles paroxystiques du rythme ou de la conduction, des indications pronostiques ou thérapeutiques peuvent également justifier l’examen.

Partie 2 - Épidémiologie et facteurs de risque cardiovasculaire

Les maladies cardiovasculaires rassemblent un ensemble d’affections aussi diverses que la maladie coronaire, les cardiopathies congénitales, les maladies cardiaques rythmiques, les cardiomyopathies dilatées, les valvulopathies, les artériopathies périphériques ou les accidents vasculaires cérébraux. Pourtant, en termes de santé publique, ce sont les maladies liées à l’athérosclérose qui en représentent l’essentiel ; ces atteintes sont très sensibles à l’environnement et au mode de vie, si bien qu’elles sont sans doute celles dont l’incidence est le plus susceptible d’évoluer au fil du temps. C’est essentiellement de ces maladies athéroscléreuses qu’il sera question ici, en illustrant les données épidémiologiques récentes par la présentation des tendances observées dans l’infarctus du myocarde.

Les maladies cardiovasculaires (infarctus du myocarde et accident vasculaire cérébral) restent en France la première cause de décès chez la femme et les sujets de plus de 65 ans (32-33 %) et la deuxième cause de décès chez l’homme (29 %) juste derrière le cancer. Cependant la mortalité cardiovasculaire a diminué de 50 % en 30 ans grâce à une prise en charge précoce des complications de l’athérosclérose mais aussi grâce à la détection des facteurs de risque qui ont permis d’évaluer le risque cardiovasculaire afin d’instaurer un traitement préventif de réduction du risque approprié.

Dans les modèles de risque multifactoriel traditionnels (le score de Framingham, ou son dérivé, le score européen SCORE (systematic coronary risk estimation), un certain nombre de facteurs de risque modifiables ne sont pas pris en compte (on les appelle donc facteurs de risque complémentaires ou nouveaux), en particulier le surpoids et l’obésité. Pourtant, la prévalence de l’obésité et de ses comorbidités, facteurs de risque évitables et modifiables par excellence, croît de manière préoccupante à l’échelle mondiale. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) indique qu’en 2014, 1,9 milliard d’adultes étaient en surpoids dans le monde, dont 600 millions d’obèses, avec une prévalence qui a plus que doublé depuis 1980. Touchant aussi bien les pays en voie de développement que, et peut-être même davantage, les pays développés, ce fléau rend compte des modifications récentes de l’alimentation et du développement de l’urbanisation : qualité nutritionnelle des régimes alimentaires insuffisante car pauvres en fibres, riche en sucres, en graisses, en sel et en calories ; modes de travail de plus en plus sédentaires, popularisation des moyens de transport. L’obésité, principalement centrale, est la principale cause du syndrome métabolique qui associe en proportion variable hypertension artérielle (HTA), dyslipidémie athérogène, trouble de la glycorégulation évoluant vers le diabète de type 2, syndrome d’apnées du sommeil et hépatopathie de surcharge. Le double risque de maladies cardiovasculaires (via le diabète de type 2 ou non) et de cancer rend particulièrement alarmante l’émergence de cette épidémie mondiale.

Priorité de la prévention coronaire

De tous les types de décès cardiovasculaires par accident coronarien, attaque cérébrale, insuffisance cardiaque, pathologies aortiques et valvulaires, ceux d’origine coronaire sont prépondérants, atteignant même la proportion de 50 % dans une enquête nord-américaine récente.

Partie 3 - Pathologie cardiovasculaire

Pour faire face à la grande variabilité des besoins énergétiques du myocarde, qui peuvent être multipliés par cinq en quelques secondes lors de l’effort et du stress, la circulation artérielle coronaire doit être particulièrement performante et réactive. Pour des raisons imparfaitement élucidées pour l’instant, cette circulation coronaire est le territoire de prédilection de localisation de la maladie athéromateuse. Une bonne compréhension de la physiologie de la circulation coronaire ainsi que des processus de formation et d’évolution des plaques d’athérome dont elle est souvent porteuse, permet de comprendre les symptômes, les méthodes d’explorations, les événements cliniques et enfin, les moyens thérapeutiques à utiliser dans les diverses formes cliniques de la maladie athéromateuse coronaire.

Définitions

Les premières descriptions de l’insuffisance cardiaque (IC) remontent à la naissance de la médecine et la complexité de ce syndrome s’est accrue avec les progrès de la biologie et de la médecine, particulièrement au cours des trente dernières années. Cela explique que de nombreuses définitions et classifications ont été proposées, en fonction des époques et des approches, aucune n’étant entièrement satisfaisante. Les sociétés savantes nord-américaines et européennes ont proposé depuis plus de 10 ans des recommandations sur le diagnostic et le traitement de l’insuffisance cardiaque. Les dernières mises à jour ont été publiées en 2016.

L’insuffisance cardiaque est un syndrome clinique complexe (et non une maladie), qui peut résulter de toute anomalie cardiaque, qui va gêner la capacité d’un ou des deux ventricules à se remplir et/ou à éjecter le sang. Presque toutes les maladies cardiaques vont conduire inexorablement à l’insuffisance cardiaque. La maladie coronaire, l’hypertension artérielle et les cardiomyopathies sont les causes les plus fréquentes dans nos pays. La majorité des patients ont des symptômes liés à l’altération de la fonction myocardique du ventricule gauche (VG), mais le terme d’insuffisance cardiaque n’est pas équivalent à celui de dysfonction ventriculaire gauche, qui correspond à des anomalies structurelles et/ou fonctionnelles qui peuvent être responsables du développement de l’insuffisance cardiaque.

Partie I : Classification

Les cardiomyopathies sont des maladies du muscle cardiaque. Elles comprennent différents types d’anomalies myocardiques, entraînant des phénotypes extrêmement variés. Il s’agit habituellement d’une atteinte primitive, et les principales causes cardiovasculaires, telles que l’hypertension, la cardiopathie ischémique ou les valvulopathies, doivent être éliminées avant d’affirmer la présence d’une cardiomyopathie.

Partie II : Cardiomyopathie dilatée

Depuis une vingtaine d’années, les outils diagnostiques et thérapeutiques ont permis un progrès considérable dans la prise en charge et le pronostic de la cardiomyopathie dilatée. Il y a encore quelques années, le diagnostic étiologique de cette atteinte structurelle était limité par les moyens dont les médecins disposaient. Actuellement, un bilan étiologique de plus en plus précis permet de trouver une origine, éventuellement génétique, d’affirmer le diagnostic de cardiomyopathie dilatée et d’éliminer une origine secondaire telle qu’une maladie coronarienne.

Partie III : Cardiomyopathie hypertrophique

La cardiomyopathie hypertrophique (CMH) est une maladie myocardique primitive pouvant revêtir plusieurs aspects cliniques et anatomiques [4]. C’est une maladie génétique monogénique hétérogène qui est une cause importante de mort subite, d’insuffisance cardiaque, d’arythmie atriale et ou ventriculaire compliquée parfois d’accidents emboliques.

Partie IV : Cardiomyopathie restrictive

De toutes les cardiomyopathies, les cardiomyopathies restrictives (CMR) sont celles que l’on rencontre le plus rarement. Elles sont caractérisées par une paroi ventriculaire rigide qui entraîne une gêne secondaire à une dysfonction diastolique, responsable d’une élévation des pressions de remplissage et d’une dilatation bi-auriculaire. En revanche, la fonction systolique est longtemps conservée et le ventricule gauche est en règle non dilaté.

Partie V : Cardiomyopathie arythmogène du ventricule droit

La cardiomyopathie arythmogène du ventricule droit (CMA VD), historiquement définie dysplasie ventriculaire droite arythmogène ou cardiomyopathie arythmogène (CMA), est une cardiomyopathie héréditaire caractérisée par une infiltration adipeuse du myocarde avec persistance de fibres myocardiques survivantes entourées de fibrose. Elle entraîne un risque accru d’arythmie ventriculaire et de dégradation de la fonction systolique ventriculaire. Elle est donc susceptible de se compliquer d’une mort subite due à une arythmie ventriculaire ainsi que des manifestations d’insuffisance cardiaque. La CMA VD serait à l’origine de 3 à 10 % des morts subites inexpliquées avant l’âge de 65 ans.

Partie VI : Cardiomyopathies inclassables

D’après les recommandations européennes sur les cardiomyopathies [210], il existe cinq types de cardiomyopathie : la cardiomyopathie hypertrophique, la cardiomyopathie dilatée, la cardiomyopathie restrictive, la dysplasie arythmogène du ventricule droit et les cardiomyopathies inclassables. Actuellement, ces dernières sont essentiellement au nombre de deux : la cardiomyopathie de Tako-Tsubo et la non-compaction isolée du ventricule gauche. Elles ont été récemment décrites (années 1990 et début des années 2000) et leurs définitions vont probablement évoluer dans le futur avec une meilleure connaissance de leurs caractéristiques.

Partie VII : Cardiomyopathies et génétiques

Initialement qualifiées d’idiopathiques, les cardiomyopathies sont désormais définies par la Société européenne de cardiologie comme des maladies du myocarde avec anomalies structurales et fonctionnelles, en l’absence de maladie coronaire, d’hypertension, de valvulopathie ou de cardiopathie congénitale suffisante pour l’expliquer. Contrairement à la classification américaine, la dernière classification européenne des cardiomyopathies conserve la subdivision classique, selon le phénotype morphologique et fonctionnel, en cardiomyopathie hypertrophique (CMH), dilatée (CMD), restrictive (CMR), ventriculaire droite arythmogène (CVDA/DVDA) et non classifiée (telle que la non–compaction du ventricule gauche [NCVG]). Elles sont ensuite subdivisées en cardiomyopathies familiales/génétiques ou non familiales/non génétiques, puis dans le premier cas, en fonction du gène ou du sous-type, témoignant de l’origine fréquemment génétique de ces pathologies.

Les myocardites sont des causes sous-diagnostiquées d’insuffisance cardiaque, de mort subite, de cardiomyopathie dilatée, de douleurs thoraciques, de palpitations, de dypsnée. Le pronostic aigu est souvent favorable, mais certains des patients peuvent développer progressivement une cardiopathie dilatée, parfois des années après l’infection. L’étude par IRM et par biopsies peut aider à faire le diag-nostic chez certains patients. Il n’y pas de traitement spécifique actuellement validé.

La myocardite est une inflammation du myocarde associée ou non à une nécrose myocardique. Sa traduction peut être clinique ou simplement histologique. Différentes formes de myocardites peuvent être différentiées en fonction du type cellulaire prédominant en histologie : myocardites lymphocytaires (virales, auto-immunes), neutrophiles (bactériennes, fongiques, et formes précoces virales), éosinophiles (myocardites d’hypersensibilité, syndrome hyperéosinophylique), et granulomateuses (sarcoïdose, myocardite à cellules géantes). Des formes intermédiaires existent.

Partie I : Troubles du rythme supraventriculaires

Les troubles du rythme supraventriculaires tiennent une place importante dans le quotidien des cardiologues, parmi lesquelles la fibrillation atriale occupe une position centrale avec une incidence croissante, principalement du fait du vieillissement de la population. C’est probablement la fibrillation atriale qui pose les problèmes thérapeutiques les plus complexes, même si son traitement fait partie de la routine quotidienne de tous les cardiologues. À côté de la fibrillation atriale d’autres troubles du rythme supraventriculaires sont à analyser : l’extrasystolie atriale, les tachycardies sinusales inappropriées, les tachycardies par réentrée intrasinusale, les tachycardies par réentrée atrioventriculaire , les tachycardies reciproques sur voies accessoires, les flutters et les tachycardies atriales.

Partie II : Troubles du rythme ventriculaires

Les troubles du rythme ventriculaire sont des troubles moins fréquents que les troubles du rythme supraventriculaire. Leur origine ventriculaire ne leur confère pas nécessairement un quelconque critère de plus mauvais pronostic.

La principale question à se poser en présence d’un trouble du rythme ventriculaire, quel qu’il soit, est de savoir s’il est associé ou non à une cardiopathie. L’absence de cardiopathie ne signifie pas obligatoirement un pronostic bénin. Inversement, la présence d’une cardiopathie, même complexe, n’implique pas toujours la nécessité d’un traitement ou d’une surveillance renforcée.

L’absence d’anomalie morphologique est cependant compatible avec une anomalie génétique dont la manifestation cardiaque sera purement électrique et non physique, myopathies mises à part.

Schématiquement, en l’absence d’anomalie morphologique et de syndrome d’origine génétique, la majorité des troubles du rythme ventriculaire peut être considérée comme bénigne ne nécessitant aucun traitement ni aucune surveillance étroite.

Toute arythmie ventriculaire doit faire l’objet d’une stratification du risque, d’une évaluation des symptômes ou du retentissement hémodynamique afin de pouvoir proposer une stratégie thérapeutique individualisée conforme aux recommandations internationales.

Partie III : Troubles de la conduction

Les troubles de la conduction intracardiaque sont fréquents, en particulier chez le sujet âgé, du fait des lésions dégénératives du tissu nodal. Ils peuvent entraîner une bradycardie paroxystique ou permanente et avoir des conséquences cliniques sévères, dominées par les troubles de conscience transitoires (syncopes et équivalents), l’insuffisance cardiaque et les troubles du rythme induits. Hors cause aiguë potentiellement réversible, ils peuvent faire discuter une indication de stimulation cardiaque définitive qui constitue le seul traitement efficace. Après un rappel de l’anatomie du tissu nodal avec quelques corrélations électrophysiologiques, ce chapitre traitera pour l’essentiel des dysfonctions sinusales et blocs sino-atriaux, et des blocs atrioventriculaires. Les blocs intra-atriaux sont étudiés plus succintement. Les blocs fasciculaires ou blocs de branche ne sont pas abordés ici.

La péricardite aiguë, affection fréquente, caractérisée par une infiltration de cellules inflammatoires au niveau des feuillets péricardiques est, dans la majorité des cas, bénigne. Entité pathologique classique, celle-ci a bénéficié récemment, de deux apports majeurs, l’imagerie de coupe, et la peu « coûteuse » colchicine.
Carrefour de la cardiologie et de la médecine interne, la péricardite aiguë reste encore à ce jour, déconcertante. Maladie « simple », le diagnostic de péricardite aiguë reste l’apanage de la clinique et de signes échocardiographiques classiques. Maladie « complexe », car derrière cette simplicité apparente, se cache une maladie inflammatoire assez secrète, dont l’origine virale est certes toujours dominante, mais qui peut aussi venir révéler une atteinte néoplasique, une maladie auto-immune, ou une exceptionnelle tuberculose. Pendant de longues années, l’échocardiographie a constitué l’imagerie de référence pour l’étude du péricarde. Toutefois, l’imagerie de coupe (tomodensitométrie thoracique et/ou IRM cardiaque) est devenue le complément indispensable de situations plus complexes, permettant la confirmation de l’atteinte inflammatoire du péricarde, la détection d’une atteinte myocardique associée, ou la découverte d’un processus intrathoracique. Enfin, au traitement anti-inflammatoire empirique est venue s’adjoindre la colchicine, molécule ubiquitaire, peu coûteuse, particulièrement efficace lors des récurrences fréquentes de la péricardite, mais aussi à la phase aiguë initiale de la maladie.

Partie I : Rétrécissement aortique calcifié

Le rétrécissement aortique calcifié (RAC) est actuellement la maladie valvulaire acquise la plus fréquente dans les pays industrialisés d’Europe et du continent nord-américain. Du fait de la quasi-disparition des valvulopathies rhumatismales dans ces pays, le RAC d’origine « dégénérative » et la bicuspidie se partagent plus de 90 % des étiologies. Compte tenu du vieillissement progressif des populations, il est probable que la prévalence de cette maladie continuera d’augmenter au cours des prochaines décennies. La prise en charge des patients porteurs d’un RAC sévère occupe donc actuellement une place prépondérante dans l’activité des équipes médicochirurgicales de cardiologie. Après l’interrogatoire et l’examen clinique, l’échocardiographie-Doppler cardiaque reste la pierre angulaire de l’évaluation d’un RAC, permettant l’évaluation du degré de calcification valvulaire, le calcul de la surface aortique et du gradient de pression transvalvulaire ainsi que l’évaluation du retentissement ventriculaire gauche et des lésions associées. La mise en évidence d’un RAC sévère symptomatique est une indication consensuelle de remplacement valvulaire aortique chirurgical ou par cathétérisme (TAVI). Au stade asymptomatique, un certain nombre de paramètres de stratification du risque (hémodynamiques, radiologiques et hormonaux) sont actuellement en cours d’évaluation, l’indication opératoire restant encore débattue. Au stade de dysfonction systolique ventriculaire gauche avec bas débit cardiaque, l’étude hémodynamique sous dobutamine et le score calcique valvulaire aortique (scanner cardiaque sans injection) permettent d’évaluer la réelle sévérité de l’obstacle aortique et participent à la stratification du risque.

Partie II : Insuffisance aortique

L’insuffisance aortique correspond à un défaut de coaptation des sigmoïdes aortiques en diastole à l’origine d’un reflux anormal de sang de l’aorte ascendante vers le ventricule gauche. Les principales causes d’insuffisance aortique dans les pays industrialisés sont les maladies touchant le tissu valvulaire aortique et/ou la géométrie de la racine aortique, les anomalies congénitales, notamment la bicuspidie aortique représentant la deuxième étiologie d’insuffisance aortique. Dans les pays en voie de développement, le rhumatisme articulaire aigu reste la principale cause.

Partie III : Rétrécissement mitral

Le rétrécissement mitral est la valvulopathie rhumatismale la plus fréquente et représente encore 10 % des valvulopathies natives en Europe. Le rétrécissement mitral est dans la majorité des cas découvert à l’âge adulte, séquelle d’une cardite rhumatismale survenue dans l’enfance ou l’adolescence. Méconnue et non traitée, la sténose peut engendrer des complications potentiellement fatales, tels un oedème pulmonaire, une embolie systémique ou une hypertension artérielle pulmonaire avec insuffisance cardiaque. Si les valvulopathies dégénératives sont actuellement plus fréquentes que les valvulopathies rhumatismales dans les zones industrialisées, le rétrécissement mitral, qui est une source de morbidité et de mortalité importante, reste en revanche un enjeu de santé publique majeur dans les pays en voie de développement.

Partie IV : Insuffisance mitrale

L’insuffisance mitrale est la deuxième valvulopathie, en termes de fréquence, nécessitant une chirurgie en Europe. La détermination de l’étiologie et du mécanisme de la régurgitation mitrale, la quantification de sa sévérité et de ses répercussions sur le ventricule gauche et les pressions pulmonaires, ainsi que la faisabilité de la réparation mitrale sont des éléments primordiaux pour guider la décision d’une intervention chirurgicale.

Partie V : Valvulopathies tricuspides

Les valvulopathies tricuspides ont été pendant longtemps méconnues et les médecins se sont essentiellement concentrés sur les valvulopathies gauches. Cependant, ces dernières années, de nombreuses études ont permis de prendre conscience que les valvulopathies droites ne doivent pas être négligées car elles nécessitent une prise en charge adaptée et elles peuvent avoir un impact pronostique.

Partie VI : Chirurgie de remplacement valvulaire aortique et mitral et état des lieux sur les endoprothèses valvulaires

Depuis plus de 40 ans, une expérience considérable de la chirurgie des valves cardiaques a été accumulée, intégrant de nombreuses avancées chirurgicales, des progrès technologiques et la prise en charge de patients de plus en plus âgés, porteurs de comorbidités. Même si le contexte actuel se focalise sur le développement de procédures percutanées, il est important de garder à l’esprit que ces innovations restent du domaine de l’évaluation clinique. Le remplacement valvulaire chirurgical, notamment pour la valve aortique et la valve mitrale, reste pour une période à venir encore longue une base thérapeutique stable et solide. Ce sous-chapitre a pour but de décrire les techniques chirurgicales validées, de faire le point sur les évolutions technologiques en cours d’évaluation et de préciser les évolutions chirurgicales nécessaires.

Définition et épidémiologie

L’endocardite infectieuse est une infection de l’endocarde intéressant le plus souvent les structures valvulaires cardiaques. Elle peut également toucher l’endocarde non valvulaire ainsi que celui recouvrant ou jouxtant un matériel implanté dans les cavités cardiaques, tels qu’une prothèse valvulaire, une sonde de stimulateur ou de défibrillateur cardiaque, un cathéter veineux central ou une canule d’assistance ventriculaire.

L’incidence de cette maladie est estimée, selon les études, entre 30 et 100 cas par million de patients-année. Elle n’a pas diminué depuis des décennies, et ce malgré les différentes stratégies de prévention mises en place. En revanche, le profil épidémiologique des endocardites infectieuses a changé depuis une vingtaine d’années dans les pays industrialisés. La diminution de l’incidence des valvulopathies rhumatismales au profit des valvulopathies dégénératives associée au vieillissement de la population générale a eu pour conséquence une augmentation de l’âge moyen des patients, de l’ordre actuellement de 65 ans. De plus, l’augmentation des indications d’implantation de prothèses valvulaires et de stimulateurs/défibrillateurs cardiaques a conduit à l’accroissement du nombre d’endocardites sur ces matériaux. Enfin, depuis plusieurs années nous assistons à l’émergence d’endocardites dites « liées aux soins » qui sont la conséquence d’infections nosocomiales et/ou de situations en rapport avec différents soins médicaux. Ce type d’endocardites représente actuellement 30 % des endocardites infectieuses et est associé à un pronostic plus péjoratif.

Les cardiopathies congénitales sont les plus fréquentes des malformations congénitales et concernent près de 1 % des naissances [8], soit pour la France environ 7 000 nouveau-nés par an. Grâce aux progrès considérables de la chirurgie cardiaque, 80 à 85 % des enfants nés avec une malformation cardiaque atteignent désormais l’adolescence et l’âge adulte. Les cardiopathies congénitales deviennent ainsi la première cause d’atteinte cardiaque chez le jeune adulte dans les pays occidentaux. Cette population continue à croître du fait de l’allongement de son espérance de vie. La diminution du taux de mortalité opératoire à moins de 5 % est également à l’origine de cette croissance. Ainsi, dans les prochaines décennies, un jeune adulte sur 150 aura une cardiopathie congénitale.

La grossesse s’accompagne de modifications hémodynamiques importantes qui peuvent décompenser une cardiopathie pré-existante, même bien tolérée antérieurement. Les cardiopathies rencontrées durant la grossesse sont rares, mais potentiellement graves. Le risque maternel et fœtal est très hétérogène, ce qui nécessite une analyse individuelle en fonction de la cardiopathie et de sa tolérance.

La sédentarité et l’inactivité physique, qui favorisent le développement de nombreuses maladies chroniques et diminuent l’espérance de vie, ne cessent de croître dans la population générale. Devant ce problème de santé publique, la pratique d’une activité physique et sportive doit toujours être recommandée et le médecin doit le plus souvent possible la prescrire et non la limiter ou, pire, l’interdire ! Il est aussi vrai qu’une pratique sportive « sans limites » peut révéler une cardiopathie méconnue dont le dépistage est essentiel. Pour remplir au mieux ce double rôle, le praticien doit être capable de dépister une contre-indication cardiovasculaire, de conseiller un pratiquant sur les activités physiques et sportives autorisées et de l’éduquer sur leur bonne pratique pour une prescription la plus individualisée possible.

Les tumeurs primitives du cœur sont rares et les métastases cardiaques sont 20 fois plus fréquentes. L’incidence des tumeurs primitives varie entre 0,02 et 0,3 % dans la population générale. Les méthodes actuelles d’explorations non invasives comme l’échocardiographie transthoracique et transœsophagienne, la tomodensitométrie et l’imagerie par résonance magnétique permettent d’en faire le diag-nostic du vivant du malade. Les tumeurs cardiaques sont généralement accessibles à la chirurgie et la majorité d’entre elles doivent être opérées, car toutes exposent à des complications graves : embolie, insuffisance cardiaque, troubles du rythme et mort subite. Seul l’examen anatomopathologique permet de différencier les tumeurs bénignes des malignes. Le myxome est la tumeur primitive la plus fréquente (près de 25 % des observations de McAllister) ; les autres tumeurs bénignes sont plus rares et sont représentées par le lipome (8 %), le papillome valvulaire (8 %), le rhabdomyome (7 %), le fibrome (3 %), l’hémangiome (3 %) et le tératome (3 %). Les tumeurs malignes primitives représentent 25 % de l’ensemble des tumeurs primitives cardiopéricardiques et sont dans la majorité des cas des sarcomes. Ainsi McAllister a-t-il retrouvé des angiosarcomes qui représentent moins de 8 % des tumeurs cardiaques primitives, des rhabdomyosarcomes (moins de 5 %) et des fibrosarcomes (moins de 3 %). Les tumeurs péricardiques sont le plus souvent bénignes, le kyste péricardique est le plus fréquent (près de 15 % des observations), et le mésothéliome péricardique est la forme maligne la plus fréquente (près de 3 % des cas).

La connaissance de la pathologie de l’aorte a largement bénéficié des grandes études épidémiologiques, cliniques et des progrès des différents modes d’exploration, de la chirurgie et des procédures interventionnelles.

La pathologie est très variée et va de l’anévrysme de l’aorte décelé « à froid », au tableau aigu de dissection aortique, véritable drame thoracique nécessitant une prise en charge médicochirurgicale selon des algorithmes bien établis.

Nous envisagerons successivement :

– la pathologie chronique ;

– la pathologie aiguë.

Malgré des disparités des modes de calcul entre pays, la pandémie à coronavirus 2019 (COVID-19) est responsable, à travers le monde entier, d’une morbidité et d’une mortalité importantes. Le mécanisme initial de l’infection par le coronavirus-2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-2) est la liaison du virus à la forme membranaire de l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2), principalement exprimée dans les poumons. Le cœur et les vaisseaux expriment également l’ACE2, et sont des cibles du virus. Les taux de troponine cardiaque, témoin d’une lésion myocardique, sont significativement plus élevés chez les patients présentant des infections plus sévères, et chez des patients admis en soins intensifs ou décédés. En juin 2020, six mois après le début de la pandémie COVID-19, la fréquence et la sévérité de l’atteinte myo-péricardique apparaissaient encore imprécises.
L’atteinte péricardique et/ou myocardique, communément retenue comme « myocardite ou myo-péricardite », est, en pratique, une complication peu fréquente, observée, aussi bien au décours immédiat de la maladie COVID-19 que de la vaccination anti- COVID-19 de façon quasi exclusive avec les vaccins ARN messager (ARNm). Cette complication a fait l’objet de nombreuses publications, en raison de l’importance pronostique d’une atteinte cardiaque, mais aussi sans doute de la symbolique représentée par le cœur.
A partir du registre COVID-19 de l’hôpital universitaire de Francfort (Allemagne), Puntman a publié en juillet 2020, une étude prospective de cohorte observationnelle (réalisée entre avril et juin 2020), ayant inclus 100 patients, récemment guéris de la COVID-19 et ayant bénéficié d’un examen cardiaque par Résonnance Magnétique Nucléaire (RMN), en moyenne 71 jours (64-92 jours) après l’épisode aigu. Dans ce groupe de patients, 78/100 présentaient des résultats anormaux de RMN au niveau des séquences T1 (n = 73), et T2 du myocarde (n = 60), ainsi qu’un rehaussement tardif du gadolinium myocardique (n = 32) et/ou péricardique (n = 22). Un épanchement péricardique (> 10 ml) était observé chez 20/100 patients. A ces anomalies de l’imagerie (Figure S05-P03-C14-1), s’associaient des anomalies biologiques dépistées le jour de l’IRM : troponine T haute sensibilité (TnT hs) élevée (> 3 pg /ml) chez 71/100 patients et anormale (> 13,9 pg /ml) chez 5/100 patients, ainsi qu’une dégradation de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG), avec dilatation des cavités ventriculaires gauche. En résumé, une atteinte cardiaque de type myo-péricardite s’observe fréquemment, indépendamment de la gravité de la présentation initiale de la COVID-19 et persiste au-delà de la période aiguë.